La vie rêvée des anges

Théâtre / Deux ans après la création Des anges mineurs acte 1, Joris Mathieu et la compagnie Haut et court présentent la deuxième partie de leur travail au Théâtre de Vénissieux. Une nouvelle plongée fantastique dans l'univers d'Antoine Volodine. Dorotée Aznar


Will Scheidmann n'a qu'un objectif : rétablir la société des justes. Poupée de chiffon devenue homme par la volonté de quelques vieilles femmes rêvant de revenir à une société égalitaire, Scheidmann part à la découverte du vaste monde du malheur. On le retrouve dans l'acte 2 ligoté, ficelé à un poteau, menacé par les veilles femmes qui ont décidé de le mettre à mort pour le punir d'avoir échoué dans sa mission. Mais ce qui n'est pas vivant ne meurt pas. Scheidmann en réchappe et se lance alors dans une entreprise périlleuse : raconter et inventer son voyage, devenir la voix de l'apocalypse pour gagner du temps et retarder l'execution. À la vision de la pièce, on réalise qu'un petit résumé de l'action n'est pas accessoire. Chez l'auteur comme chez le metteur en scène, on a parfois la nette impression d'avoir manqué un épisode, qu'une partie du spectacle s'est déroulée en notre absence. De l'art d'interrompreSi vous ne connaissez pas l'œuvre d'Antoine Volodine et si vous n'avez pas assisté aux représentations de l'acte 1 il y a deux ans, il faudra accepter de ne pas vous rendre à une pièce comme les autres. Ici, il est impossible de s'accrocher uniquement au sens, au récit. Joris Mathieu travaille sur «le choc esthétique et sur des formes où le sens est aussi à créer par le spectateur». Les Anges mineurs valent ainsi et surtout pour le travail qui est fait sur les images : d'une beauté troublante, elles sont aussi confondantes. La vidéo, omniprésente, se mêle constamment au jeu des acteurs. Bien malin celui qui saura cerner avec précision les limites du plateau et le «vrai» du «faux». Et c'est le principe même de cette forme de «théâtre optique» : les images projetées se reflètent sur les miroirs et au milieu des images évoluent des comédiens. Les acteurs avancent masqués, des masques effrayants qui font ressembler les vivants à des morts, à la limite eux aussi du rêve et de la réalité. Dans le monde de Joris Mathieu, il faut savoir se taire, regarder et se laisser porter. Comme par magie, les images s'impriment ainsi dans l'esprit du spectateur qui ne sait s'il a vu ou s'il a rêvé. Dernier argument pour vous rendre au Théâtre de Vénissieux en forme d'avis aux récalcitrants, le résumé de l'acte 1 sera également présenté en préambule vendredi 18 janvier.Des Anges mineurs acte 2Ms Joris MathieuJusqu'au 18 janvierAu théâtre de Vénissieux


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