Collection in progress

Expo / L'IAC dévoile au public ses acquisitions récentes et ses projets d'acquisitions. Le tout concerne une dizaine d'artistes contemporains et réserve de bonnes surprises. Jean-Emmanuel Denave


Après avoir accueilli la Biennale d'art contemporain et avant de fêter son 30e anniversaire, après le départ de Jean-Louis Maubant son fondateur et depuis la nomination de Nathalie Ergino sa nouvelle directrice, force est de constater que la ligne artistique de l'Institut d'Art Contemporain n'est pas des plus limpides… En attendant, l'IAC a décidé, en sus de ses expositions temporaires, de faire un point tous les deux ans sur la collection d'art contemporain Rhône-Alpes dont il a aussi la charge. Cette première exposition bilan s'articule autour de dix artistes qui disposent chacun d'une ou deux salles. Nombre d'entre eux ont été exposés récemment à l'IAC comme le facétieux François Curlet qui présente quelques «architectures fainéantes» faites de «lâchers» de béton comme on casse un œuf sur le plat. Ou encore Laurent Grasso, artiste explorant l'imagerie moderne, les ondes électromagnétiques, les dispositifs de contrôle et de surveillance... On redécouvre ici son travail sur la base Echelon (système mondial de réception satellitaire des communications par téléphone ou Internet, situé en Grande-Bretagne) : une maquette de la base voisinant avec une vidéo montrant d'inquiétantes et crépitantes antennes émettrices-réceptrices.Tout un poèmeDe l'ex-lyonnais Melik Ohanian, on peut revoir aussi l'une des œuvres les plus intrigantes : Invisible Film, vidéo où l'on voit un projecteur de cinéma planté dans le désert au crépuscule, projetant dans le vide un film de Peter Watkins (Punishment Park) sur le lieu même de son tournage. La disparition de la fiction rejoignant bientôt la disparition de la réalité lorsque la nuit sera totalement tombée. Ann Veronica Janssens, célèbre pour ses pièces-environnements à partir de gaz colorés, installe à l'IAC un petit et amusant laboratoire expérimental où elle montre tout un bric-à-brac de travaux en cours, d'œuvres ratées, d'expériences préparatoires… Mais ce sont deux artistes poètes, deux ovnis de la scène artistique, qui retiennent le plus l'attention. Jimmie Durham, artiste d'origine Cherokee exilé à Rome, qui par exemple étale au sol un arc de triomphe composé de bouts de ferraille, bombarde un lit d'une énorme pierre, lapide un frigo ou, dans une vidéo, parle d'habitat en pleine nature. Violence, révolte et douceur poétique trouvent ici une singulière alchimie… Notre second ovni est son compatriote Allen Ruppersberg, artiste inclassable traçant son chemin dans les contre-allées de la culture underground, mélangeant l'art à la vie, la haute culture à la culture populaire. Son “Never ending book. Part One : The Old Poems (For My Mother)» accumule boîtes de couleurs vives, affichettes, fragments de textes, photocopies, références à Whitman aussi bien qu'à Roussel ou Burroughs. Un poème qui se plie et se déplie en mots, évocations, volumes, touches de couleurs, énigmes… Et ne se termine jamais.


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Aïe ! Un poète