Sa majesté Minor

Folk / Aux commandes d'un folk au geste ample et aux accents graves, Minor Majority troque chemises à carreaux contre complaintes sur le carreau. Et confirmera sans nul doute au Sirius qu'il est l'un des plus dignes ambassadeurs de la scène scandinave. Stéphane Duchêne


Depuis septembre dernier, le folk scandinave est en deuil. Sa figure de proue, Thomas Hansen aka St Thomas, ersatz nordique de Neil Young, a été retrouvé mort dans son appartement d'Oslo à l'âge de 31 ans. Jusqu'à cette disparition aux causes indéterminées (syndrome Heath Ledger ?), St Thomas entraînait dans son sillage une scène folkisante que le label Fargo avait eu la bonne idée de réunir en 2006 sur une savoureuse compilation : Cowboys in Scandinavia (titre clin d'œil au classique de Lee Hazlewood, Cowboy in Sweden). Le sceptre vacant, les prétendants au trône de Scandinavie sont nombreux et ont des noms qui fleurent bon le saumon fumé : Christian Kjellvander, Thomas Hellberg, Nicolai Dunger ou José Gonzalez (même si son nom à lui évoque davantage la paëlla aux fruits de mer). Grosse cote de la bande, absente de ladite compilation, on parierait bien deux couronnes sur Minor Majority. Inconnu dans nos contrées, le quintette est l'un des meilleurs vendeurs de disques de Norvège et un grand rafleur de Grammys locaux (les bien nommés, enfin on l'imagine, Spellemannsprisen). En quatre albums, Minor Majority a su doter son spleen septentrional de l'hospitalité classieuse généralement constatée chez le scandinave moyen. Cousins britishMieux, le groupe a le mérite de privilégier l'émotion au folklore, la mélodie contemplative au décorum western. Et peut compter en cela sur la voix du ténébreux Pal Angelskar, profonde comme un fjörd mais brumeuse comme le Londres malté des Tindersticks. C'est d'ailleurs à ces cousins british guère suspects de passions western qu'on les assimile le plus souvent. Pour la troisième fois en 3 ans, Minor Majority fait étape à Lyon. La dernière fois, à l'Epicerie Moderne, en mai 2006, les Norvégiens avaient conquis avec une classe folle le public de Feyzin, coupant l'herbe sous le pied de la tête d'affiche Elysian Fields. Hasard du calendrier promotionnel, Minor Majority sort ces jours-ci Candy Store, non pas un cinquième album mais une double compilation garnie tout à la fois de leurs meilleurs titres, de raretés mais aussi de quelques inédits. Ce genre de condensé permet généralement de faire patienter les fans en attendant le retour de l'inspiration. Ici cela marque davantage une sorte de bilan qui se voudrait nouveau départ. Une manière de rallier par la synthèse des tombereaux de novices prêts à succomber afin de mieux partir à la conquête du monde. Quand on voit où en sont rendus certains VRP du rayon tire larmes qui, sans avoir la moitié de l'inspiration des Norvégiens, remplissent des stades, c'est tout ce qu'on souhaite à Minor Majority. Une couronne sinon rien. MINOR MAJORITY + BENJAMIN FINCHERAu Sirius, le vendredi 7 mars«Candy Store» (Vicious Circle/Discograph)


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