Archi(e) Jazz

Après Jazz à Vienne, l'an dernier, la légende Archie Shepp illuminera la 21e édition d'À Vaulx Jazz. Logique, tant la carrière du saxophoniste est étroitement liée à l'évolution des musiques noires contemporaines dont ce festival est une vitrine plus que digne. Stéphane Duchêne


Disons-le sans détour, au risque d'éclipser le reste de la programmation de cette 21e édition, l'événement d'À Vaulx Jazz 2008 est la venue d'Archie Shepp. Une apparition qui marque le retour en force de ce fringant septuagénaire sur de nombreux fronts, que ce soit sur le dernier album du rappeur Rocé Identité en crescendo, dans le film très jazz de Jalil Lespert 24 mesures, ou même dans quelque débat télévisé où son statut de chantre des droits civiques et des luttes sociales l'emporte alors parfois sur celui de prodige du saxophone. Car si Shepp est dès 1960 un pilier de l'une des grandes révolutions musicales de la deuxième moitié du siècle dernier, à savoir le free jazz, s'il a joué aux côtés de géants comme John Coltrane, Cecil Taylor, Chet Baker, McCoy Tyner et même Frank Zappa, il a également officié pendant 30 ans comme professeur d'études afro-américaines. D'abord à l'Université d'Amherts, Massachussetts, où il enseigne la musique et l'histoire de la musique afro-américaine, puis à la State University of New York où son enseignement recouvre cette fois l'ensemble de la question noire. JazzwomenSon jazz libertaire teinté d'africanité et irrigué par les préoccupations politiques liées à la lutte des minorités noires a logiquement toujours pointé les injustices qui ont frappé africains et afro-américains. Ce, dès le milieu des 60's avec Fire Music, influencé par Malcolm X (mais où il concasse aussi le standard bossa nova The Girl From Ipanema). Une préoccupation qui culmine avec le légendaire Attica Blues et le conduit à travailler avec d'autre activistes de la cause comme le pionnier du rap Jallal Nuriddin, tête pensante des antiques Last Poets. Saxophoniste (alto et ténor), clarinettiste, mais aussi chanteur à l'occasion, Shepp le caméléon s'épanouira ainsi de plus en plus à la croisée des genres. Ce sera encore le cas à À Vaulx Jazz cette année avec la chanteuse franco-béninoise Mina Agossi : confrontation de deux imaginaires marqués, sur le terrain volatile d'un jazz qui s'annonce, à tous les sens du terme, plus «free» que jamais. Pour le reste, entre le grand Michel Portal, un hommage à Art Blakey, le bluesman Jimmy Burns, le retour de Guy « Nestor Burma » Marchand version crooner, et de nombreux artistes internationaux ou locaux, reconnus ou non, cette 21e édition entend célébrer les jazzwomen, la journée internationale de la femme tombant en plein festival, le 8 mars. Au programme des talents divers venus d'horizons qui le sont tout autant : la californienne RAD, la québécoise Térez Montcalm, l'espagnole Buika et surtout Diunna Greenleaf, imposante matrone de Houston dont l'organe tellurique fait, dit-on, décoller les fusées. À VAULX JAZZAu Centre Charlie Chaplin (Vaux-en-Velin)Du 5 au 15 Mars


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