L'Ange de la vengeance

ABEL FERRARA Aquarelle/Seven 7


Deuxième film d'Abel Ferrara, pas encore sorti des bas-fonds new-yorkais qui irriguent l'oppressante première partie de son œuvre, L'Ange de la vengeance possède le cachet cheap et sale d'un cinéma tourné à l'arraché, à l'énergie mais avec une sincérité sans faille. Le titre original Ms. 45 (rien à voir, rassurez-vous, avec l'horrible MR 73 !) dit mieux que son emphatique traduction française de quoi le film retourne : une demoiselle sourde et muette nommée Thana (comme Thanatos : attention, symbole !), se fait violer deux fois dans la même journée, mais bute son dernier agresseur puis récupère le magnum 45 avec lequel il la menaçait. Elle se transforme alors en justicière nocturne, flinguant sauvagement tout ce qui porte couilles et se montre un peu entreprenant avec la gente féminine. De la névrosée fragile à la névropathe déterminée, de la vierge effrayée à l'archange exterminant toute trace de sexualité (c'est déguisée en nonne qu'elle orchestre le carnage final), la transformation de Thana est aussi la métamorphose de son actrice, Zoé Tamerlis, qui retravaillera avec Ferrara pour le scénario de Bad Lieutenant, avant de connaître une overdose fatale. Faisant apparaître progressivement son incroyable beauté, le cinéaste donne ainsi à l'actrice toute l'ambiguïté nécessaire pour rendre crédible le personnage : le plaisir avec lequel elle se rend désirable pour mieux retourner cette séduction contre ceux qui la désirent, est un saisissant raccourci de ce qu'est, dans le fond, le puritanisme...CC


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