Ploy

de Pen-ek Ratanaruang (Thaïlande, 1h47) avec Lalita Panyopas, Pornwut Sarasin…


Un couple revient à Bangkok pour un enterrement. Ils vivent aux Etats-Unis, mais ils sont nés en Thaïlande. Il est restaurateur, elle est une ancienne «star» de cinéma. Le mari descend acheter des cigarettes au bar, et y croise une jeune punkette nommée Ploy, qu'il ramène dans leur chambre. Pendant ce temps, l'épouse a trouvé sur un papier un nom et un numéro de téléphone, éveillant ses soupçons sur une possible infidélité de son mari…
On détaille l'intrigue, mais ce n'est pas l'important dans l'étrange nouveau film de Pen-ek Ratanaruang, remarqué grâce à Vagues invisibles et surtout le très beau Last life in the universe. Car Ploy avance comme un rêve, figure d'ailleurs largement exploitée dans le corps même du film — à plusieurs reprises, les personnages se réveillent en sursaut, comme si la séquence que l'on venait de voir n'avait pas existé.
Le cinéaste cherche ainsi à faire vaciller la réalité sur l'écran, en plongeant chaque scène dans une atmosphère cotonneuse et alanguie. Le rêve peut devenir érotique, comme lors de cette scène d'amour entre une femme de ménage et un barman ; il peut aussi virer au cauchemar lors d'une descente chez un brocanteur inquiétant.
Mais l'important est que les choses glissent hors de portée d'un spectateur hypnotisé ou, c'est un peu le risque, assoupi. Ratanaruang, à ses risques et périls, se rapproche ainsi de l'autre grand cinéaste thaïlandais actuel, Weerasethakul, par cette manière d'explorer avec un volontarisme très «film pour festival» les limites de la narration cinématographique. La grâce et la beauté de ses images, la présence fantômatique des acteurs, ainsi qu'une bande-son digne d'un album de Boards of Canada, suffisent cependant à faire de Ploy un film ambiant assez exigeant, mais pas déplaisant.CC


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