Faire bouger les lignes


Expo / Rémy Jacquier est, si l'on nous passe l'expression, un drôle de zèbre. Pas seulement parce que ses œuvres comportent nombre de zébrures, ratures, ou autres tremblements browniens crayonnés ou gravés. Mais aussi et surtout parce que sa démarche artistique mêle paradoxalement le plus grand sérieux (rigueur, complexité, références culturelles…) et des aspects totalement loufoques. Né en 1972 à Chambéry, formé à l'Ecole des Beaux-Arts de Saint-Étienne et vivant actuellement à Nantes, ville des surréalistes, Rémy Jacquier est un jeune descendant de Fluxus ou des règles arbitraires de l'Oulipo. Il fabrique par exemple des instruments à vent totalement délirants avec lesquels il exécute des performances, ou bien loge et observe un bourdon dans la maquette d'un pavillon… L'URDLA présente la quasi totalité de son œuvre gravée ainsi que trois étranges maquettes noires de bâtiments industriels. Des bâtiments indéterminés et quasi autistes, ne comportant aucune fenêtre et dont les escaliers semblent s'enrouler sur eux-mêmes. Parmi ses estampes on découvre des eaux fortes au trait emberlificoté et sismique traduisant le roulis d'un train emprunté par l'artiste, de grandes partitions de Beethoven ou Messiaen brouillées et tremblées jusqu'à l'illisible et l'inaudible, d'apparents escargots qui s'avèrent les représentations d'oreilles internes animales ou humaines… Musique, littérature, gravure : Rémy Jacquier ne cesse de passer d'un domaine à l'autre, de transposer, de traduire, de trahir… Il effectue des sauts graphiques d'une partition artistique à une autre, d'un trait de la main à celui d'esprit. Ses œuvres intriguent, vacillent, échappent toujours, et séduisent par leurs qualités plastiques propres et leur liberté de déplacements.Jean-Emmanuel DenaveRémy Jacquier, «multipartitas», jusqu'au 25 mai à l'URDLAPerformance de l'artiste le 16 mai à 18h30


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Une biennale au futur antérieur