La République des lettres

Pour sa deuxième édition, les Assises Internationales du Roman se dérouleront du 26 mai au 1er juin avec près de 90 écrivains et critiques venus des quatre coins de la planète pour décortiquer les enjeux de l'art romanesque. Un rendez-vous littéraire sans équivalent ! Yann Nicol


La Villa Gillet et Le Monde s'unissent à nouveau pour proposer au public lyonnais un événement de très grande ampleur autour de la littérature et de son genre le plus répandu et le plus lu : le roman. Intitulée «Le roman, quelle invention !», la présente édition aura à nouveau pour but de comprendre les multiples enjeux d'un genre dont on a maintes fois annoncé la mort, et qui ne cesse de prospérer et de se renouveler. Le rôle du roman varie-t-il en fonction des origines géographiques ? Quelles sont les évolutions narratives permettant de rendre compte du réel et de la complexité du monde ? En quoi les œuvres littéraires ont-elles une influence sur les faits politiques et sociétaux ? Y a-t-il encore des choses à inventer sur des thèmes éternels et largement exploités ? Quel rapport existe-t-il entre réalité et fiction ? Quels sont les secrets et les énigmes inhérents à la construction d'une œuvre ? Autant de questions qui seront abordées sous la superbe verrière des Subsistances, avec une quinzaine de tables rondes proposant des angles de réflexion divers et variés. Pour chacune d'entre elles, on retrouvera quatre écrivains de nationalités et d'univers romanesques parfois très éloignés, appelés à réfléchir sur ce qui caractérise leur écriture romanesque et leur rapport à la réalité. Une manière de confronter des auteurs issus de contextes culturels et politiques radicalement différents, mais qui ont en commun de répondre à un héritage littéraire identique (Laurence Sterne, Cervantes, James Joyce, Borges, Marcel Proust, Faulkner...) et de voir apposé, sous le titre de leurs livres, l'énigmatique et multiple terme de «roman». Fiction et compagnie
Parmi ces tables rondes, qui aborderont des thèmes aussi différents que l'amour, la transgression, le roman de mœurs, le roman de formation ou la «fissure géographique», il s'en trouve quelques-unes que l'on ne raterait sous aucun prétexte. En premier lieu, le débat intitulé «Le roman puzzle», qui réunira le jeudi 29 mai à 21 heures les Français Éric Reinhardt et Geneviève Brisac, ainsi que l'Irlandais Joseph O'Connor et le génial Argentin Rodrigo Fresan, qui avait livré, avec "Mantra", un des romans les plus impressionnants qu'il nous ait été donnés de lire ces dernières années. Les amateurs de cinéma ne rateront pas la table ronde consacrée aux écrivains cinéastes (le 30 mai), en compagnie de la Chinoise Xiaolu Guo, du Français Christophe Honoré et de l'Israélien Etgar Keret, tandis que l'on vous invite très chaudement à découvrir l'Italien Alberto Garlini qui participera à une discussion autour du roman de mœurs (29 mai à 18h30) avec Yannick Haenel et, excusez du peu, le Libanais Rachid El-Daïf et le grand romancier indien Tarun J. Tejpal ! Un dernier conseil concernant deux autres débats majeurs : «Le secret des origines» avec, entre autres, la fascinante Hélène Cixous et l'Américain Daniel Mendelshon, dont "Les Disparus" a reçu cette année un très mérité Prix Médicis étranger, ainsi que «Invention, intervention», un débat centré sur la question de l'engagement et de la dimension politique de la littérature, qui réunira Jean-Yves Cendrey, Karen Connelly, Dimitri Verhulst et l'impressionnant Pedro Rosa-Mendes, auteur il y a quelques années d'un roman coup de poing sur la situation dramatique de l'Angola, "Baie des tigres".Grands entretiens
Outre ces débats collectifs, qui seront systématiquement animés par des journalistes français et étrangers (notamment les américains Eric Banks et Nathaniel Rich), les Assises Internationales du Roman seront aussi l'occasion d'assister à un certain nombre de lectures alléchantes et à de grands entretiens individuels. Ce sera le cas avec le grand Carlo Ginzburg, l'un des représentants de la méthode «microhistorique», qui donnera sur la littérature un regard différent et particulièrement érudit, mais aussi de la Britannique Rachel Cusk, qui sera conviée pour évoquer l'un de ses livres de chevet, Bonjour tristesse, de Françoise Sagan. Sûr que l'auteur du très remarqué Arlington Park aura beaucoup à dire sur ce petit livre fulgurant qui avait secoué le monde des lettres et la société française tout entière, à sa sortie en 1954. Quant à Adam Thirlwell, il sera lui aussi seul sur l'estrade, pour nous livrer des commentaires à chaud sur les archives littéraires de l'INA qui lui seront alors projetées. Une occasion pour l'auteur de l'hilarant Politique de montrer son extraordinaire talent et sa formidable connaissance de l'histoire littéraire. Notons enfin que ceux dont les après-midi sont libres auront également la chance d'assister à des rencontres individuelles dans certaines bibliothèques de l'agglomération (les rencontres ont lieu à 15 h) : Eric Reinhardt à la M.L.I.S de Villeurbanne, Dany Laferrière à La Mulatière, Rachid El-Daïf à la bibliothèque du 6e ou Fatos Kongoli dans celle du 4e arrondissement, permettront ainsi aux habitués de Laurent Romechko d'oublier les chiffres, de se consacrer aux lettres et de participer à ce grand rendez-vous du roman dans tous ses états...


<< article précédent
«Une géographie sensible et intellectuelle»