Collection automne-hiver

Les salles du GRAC proposent une nouvelle ciné-collection mensuelle, aux choix toujours aussi éclectiques. Ce mois-ci, le classique de Clouzot, "Quai des orfèvres". CC


L'initiative est partie des Alizés de Bron : recréer le concept, ancien mais pas démodé, de ciné-club… Un classique, une discussion avec les spectateurs après le film pour mettre le cinéma en perspective et proposer une alternative à la quête insatiable de nouveauté. Puis les choses ont pris de l'ampleur : les salles du GRAC (Groupement Régional d'Actions Cinématographiques) ont répondu présentes, et c'est aujourd'hui une quinzaine de cinémas à Lyon et en périphérie qui accueillent les films de la Ciné-Collection. Le programme de ce nouveau semestre a débuté en septembre avec Aguirre, la colère de Dieu, grand film halluciné par le tandem Herzog/Kinski. Il se poursuivra avec des œuvres aussi différentes que L'île nue de Kaneto Shindo, un OVNI sans dialogue qui montre la vie d'une famille de cultivateurs japonais sur une île, où le réalisateur sublime le passage des saisons par l'utilisation lyrique du cinémascope, du noir et blanc et de la musique, ou Mad Max, qu'on ne présente plus mais qu'on présentera quand même en janvier. Et entre les deux, l'irrésistible comédie de Blake Edwards Diamants sur canapé avec la craquante Audrey Hepburn.Diamant noir
En ce mois d'octobre, c'est le patrimoine du cinéma français qui est à l'honneur avec Quai des orfèvres d'Henri-Georges Clouzot. Troisième film du réalisateur et premier tourné après-guerre (1947), il s'agit d'un polar classique (un meurtre, une enquête, un faux coupable…) que Clouzot ponctue de détails personnels et iconoclastes. À commencer par le fait que le policier en charge du crime (Louis Jouvet) ne débarque à l'écran qu'après trente-cinq minutes de film. Loin d'être un modèle de vertu, ce flic est surtout un parangon de misanthropie brutale — la police dans le film a d'ailleurs des méthodes dignes de Jack Bauer dans 24. Ancien des colonies, dont il a rapporté un enfant, il est le bras nécrosé d'une justice guettée par des media avides de sensationnel. Un constat visionnaire, à moins que les choses n'aient pas vraiment changé depuis soixante ans… De l'autre côté de la loi, le monde du music-hall permet à Clouzot de provoquer la censure, la décadence du milieu offrant l'opportunité de jouer sur un érotisme fétichiste qu'il développera plus tard dans sa carrière. Excellemment filmé, dialogué et interprété, Quai des orfèvres frappe toujours par sa maîtrise et sa noirceur. De quoi justifier largement sa place dans cette nouvelle Ciné-collection.Quai des orfèvres
Jusqu'au 4 novembre
www.grac.asso.fr


<< article précédent
Mouawad se la joue sobre