Oiseau de bonheur


Au rayon helvète on a beau chercher, plus culte que les Young Gods, on ne voit guère que le Gruyère, ce dernier étant certes moins avant-gardiste que les rockers suisses. On ne s'attardera donc pas sur ces Dieux de moins en moins jeunes qui ne manquent jamais de reconnaître les leurs, toujours fidèles au poste à chacune de leur apparition (ici en mode acoustique). Attardons-nous plutôt sur la formation qui assurera la première partie ce soir-là, à savoir Shearwater, originellement projet récréatif de deux membres d'Okkervil River, Jonathan Meiburg et Will Sheff. Aujourd'hui, Meiburg ne fait plus partie d'Okkervil River et Sheff n'est plus à l'affiche des productions Shearwater ; chacun a donc pu tracer sa route et accéder à ce qui marque souvent l'envol d'un musicien : l'émancipation. Un «shearwater» étant un oiseau marin qui maraude à la surface des eaux, c'est sans doute ce qui explique que là où Okkervil River serpente sur des cours d'eau bileux, Jonathan Meiburg, diplômé en ornithologie, alterne descentes en piquées et embardées ascensionnelles. Disons-le tout net, le dernier ouvrage en date de Shearwater, Rook, est une pure merveille dont le lyrisme revient toujours à hauteur d'homme, la tête dans les cimes, mais les pieds plantés dans le sol ou posés sur l'eau. À partir d'une glaise très ancrée dans les racines folk américaines, Meiburg parvient ainsi à bâtir un univers où l'imaginaire pop se teinte de psychédélisme western. Sûr que si les deux amis continuent de tirer profit de cette émulation, ils finiront par atteindre des sommets qu'on a pour l'heure du mal à visualiser. Mais on ne demande que ça. SD

The Young Gods + Luis Francesco Arena + Shearwater
À l'Epicerie Moderne
Mercredi 12 novembre


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Épisode 2