Monstres gentils

Sophie Perez et Xavier Boussiron aiment les masques vendus dans les boutiques de farces et attrapes, les coussins péteurs et ne pas parler sérieusement de leur travail. Ils aiment aussi Gombrowicz et lui rendent hommage dans une création présentée trois soirs aux Subsistances. Dorotée Aznar


Sophie Perez et Xavier Boussiron ont (au moins) un point commun. Ils vouent un amour inconditionnel à Gombrowicz, grand écrivain polonais du XXe siècle. De lui, ils ont tout lu, vouent un culte à sa mauvaise foi et à son caractère acariâtre. Ils convoquent régulièrement l'auteur, par bribes, dans leurs créations. Gombrowiczshow est donc un moyen d'en finir avec cet auteur, de traverser son oeuvre avec pour fil rouge un roman : Les Envoûtés. On nous a souvent reproché de faire des private jokes, d'être trop élitistes. Avec Les Envoûtés, Gombrowicz voulait écrire un vrai roman de gare, un livre facile qui ne s'adresse pas à l'élite. Il s'est rendu compte que c'était beaucoup plus difficile... Avec Gombrowiczshow, nous avons décidé nous aussi de créer un vrai succès populaire, s'amuse Xavier Boussiron.

QUESTION DE FORME
Dans son oeuvre, Gombrowicz parle toujours du problème de la forme. Gombrowiczshow est sans doute plus proche de la forme théâtrale qu'ont pu l'être les autres spectacles de la compagnie. Dans la forme, l'écriture de Gombrowicz est très classique. Son œuvre est faussement orthodoxe. En réponse, on essaie de faire du théâtre normal. Sur la scène, cinq acteurs “tout terrain”, en costumes d'époque ou la tête cachée par des masques monstrueux, cinq hommes et femmes plus forts que la montagne se sont approprié l'auteur. À droite, un énorme bloc de rochers occupe le plateau. Quand on a reçu cette énorme montagne, elle était exactement conforme à ce que l'on voulait. Super réaliste, énorme, gothique, romanticodésespérante. On s'est tout de suite demandé : mais qu'est-ce qu'on va pouvoir en foutre ?. Avec cette «méta-toile de jute» pour décor, Gombrowiczshow se veut également un spectacle documentaire assaisonné d'un soupçon de tendresse vinaigrée. Il était temps de créer un vrai spectacle didactique, lance Sophie Perez dans un rire, un spectacle compris par tous, y compris par ma famille. Mes parents ne désespèrent pas de me voir devenir la prochaine Anne Roumanoff. Mauvaise foi, quand tu nous tiens.

GOMBROWICZSHOW
Aux Subsistances, les 5, 6 et 7 novembre


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Flore, sauvage et cultivée