Les Trois singes

De Nuri Bilge Ceylan (Fr-Ita-Turquie, 1h49) avec Ahmet Rifat Sungar, Atice Aslan…


Cinéaste d'un formalisme contemplatif souvent au-delà du raisonnable (Uzak, Les Climats), Nuri Bilge Ceylan a trouvé ici un sujet (la dislocation d'une famille engoncée dans le mensonge et les non-dits) à même de canaliser habilement ses obsessions esthétiques – pour ne pas dire esthétisantes… Dans une lumière sépulcrale, le réalisateur se joue de son atmosphère de faux huis clos, manipule ses personnages pour mieux souligner leurs apparentes contradictions, enchaîne les dialogues de sourds, installe une pression étouffante dont la violence latente ne demande qu'à exploser. Un jeu de massacre parfois un rien trop languide (soyons clairs, Les Trois singes est un film qui se mérite), où percent cela dit de prodigieuses idées de mise en scène : quand Nuri Bilge Ceylan remonte à mi-parcours le fil du traumatisme commun, il le fait à la grâce d'une inventivité visuelle sidérante et, surtout, sans asséner pour autant d'explication sentencieuse. On sent que la tentation d'un symbolisme grossier n'est jamais très loin, mais le réalisateur garde le cap, et fait macérer son malaise d'une façon adroitement diffuse. FC


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