Halte-là !


Théâtre / Des stries, un Tetris, une pluie de lettres façon Matrix projetées comme contours de décor, des marques au sol pour délimiter le terrain jamais respecté de chacun façon Dogville et trois hommes qui se cherchent, se marchent sur les pieds, tentent de cohabiter. Ils sont policiers. L'un débute, abrupt et fougueux ; le deuxième est désenchanté et dépressif, moquant la naissance de l'enfant de ses amis pour mieux circonscrire son malaise abyssal de n'avoir rien construit ; le dernier, retraité, a passé l'âge de la déprime léthargique et s'agite autour de bombes sexuelles en ne parvenant pas à masquer sa solitude. Loin d'un commissariat nerveux comme celui des Experts, Gilles Chavassieux a choisi de placer ces trois hommes dans un terrain vide, tout juste modulé par un bar, un canapé et un frigo transformé en fontaine à bière. Dans cet espace, les comédiens se donnent les répliques comme on attrape un ballon au vol, pour ne pas casser le filin qui les maintient en vie alors que tout les incite à arrêter les frais. Ils luttent contre la pauvreté qui les entoure et dont il sont victimes, se débattent avec eux-mêmes. Notamment Alban, jeune raciste ordinaire qui ne voit pas le mal et tente de se justifier dans l'affaire qui le voit accusé d'avoir provoqué la mort d'un suspect. Insidieusement, ils sont de plus en plus contaminés par la bassesse, la démission et la peur et, dans un mouvement synchrone, la mise en scène gagne en densité jusqu'à ce constat glaçant qui ne se prive pas d'absorber les spectateurs : la police est dans les veines de chacun. «Il faut une chaise pour la police dans tous les foyers, au cas où...» écrit Fabrice Melquiot dans une pièce assourdissante qui s'incruste dans nos rétines comme un tatouage. Nadja PobelFaire l'amour est une maladie mentale qui gaspille du temps et de l'énergie
Au Théâtre des Ateliers jusqu'au 6 février.


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Miroir, mon beau miroir…