Bon Iver

Blood Bank Jagjaguwar Differ-ant


Evelyne Dhéliat a beau dire, c’est quand l’hiver est rude que l’Iver est Bon. D’où sans doute, cette pochette très enneigée du nouvel Ep de Bon Iver (né Justin Vernon dans le frais Wisconsin). Une pochette héritière du temps maussade de For Emma, For Ever Ago, son précédent disque, récit d’une rupture dont même ses fans ne cicatriseront jamais. Les morceaux de cet Ep, le doucereusement épique Blood Bank en tête, ont quelque chose de cette grâce rageuse que l’atmosphère sourde de l’enneigement empêche d’exploser dans un grand fracas comme de l’autre côté de la frontière, chez les Canadiens de Constellation ou d’Arcade Fire. Ici, la déflagration étouffe dans le chagrin feutré sans déranger la faune alentour. Comme cette touche d’électricité qui point, légère car le groupe électrogène qui jouxte la cabane a le hoquet ; ou ces chœurs discrets étalés comme des couches de neige mais résonnant pour personne. Ainsi de Woods, qui clôt le disque, comme si les Islandais de Sigur Rós chantaient le gospel dans la plus petite église du monde, édifiée par des castors. Si Bon Iver prouve ici une chose, en plus de montrer qu’il est un songwriter doué, c’est qu’il n’a pas besoin d’un album entier pour enfouir son auditeur sous une avalanche de sentiments. Quatre titres, quand ce n’est pas quatre notes, suffisent amplement.
SD


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