Loney, dear

Dear John Delabel/EMI


Peter Von Poehl nous expliquait récemment que la vigueur de la pop suédoise était le fruit d’une subvention étatique qui, fut un temps, octroyait l’équivalent de 50 euros à tout jeune suédois désireux de monter un groupe. Mais si le simple fait de recevoir 50 euros faisait de chacun de nous un génie, l’œuvre de Paul-Loup Sulitzer (exemple non contractuel) eut mérité le Nobel. Et ce ne sont pas les couronnes suédoises qui expliqueront le talent d’un Loney, Dear, alias Emil Svanangen qui livre ici son dernier album sous ce nom. Comme s’il était pressé d’en finir, il attaque pied au plancher avec le tourbillonnant Airport Surroundings, décollage en vrille sur les ailes d’un Sufjan Stevens supersonique. C’est une constante de Dear John : cette sensation qu’a l’auditeur de s’envoler pour ne plus jamais devoir atterrir. À la manière d’un Nils Holgersson perché sur son jar, ce dernier voit défiler un paysage d’une grande richesse surplombé de cumulo-nimbus gigantesques et majestueux. Artisan génial de l’arrangement de la matière pop, Loney, Dear assemble des éléments en apparence anodins en de magistrales orchestrations au design impeccable. Avec en fond sonore une pulsation inquiète, comme une conscience meurtrie de l’aspect terminal de ce voyage. On attend avec impatience le prochain sous un autre nom et sous d’autres cieux.
SD


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