Coco avant Chanel

D'Anne Fontaine (Fr, 1h53) avec Audrey Tautou, Benoît Poelvoorde, Alessandro Nivola…


La mode du biopic n'est pas près de se tarir sur les écrans, chaque pays se cherchant héros et héroïnes pour en faire de romanesques adaptations suçant la roue du modèle américain. Coco Chanel a déjà remporté le titre français en 2009, puisqu'avant la version Jan Kounen à venir au second semestre, voici sa jeunesse en mode Anne Fontaine. La cinéaste livre une copie appliquée où rien ne manque sur le pourquoi du comment de la vocation et des engagements de Gabrielle dite Coco. En témoigne la scène initiale où, abandonnée par son père dans un pensionnat de bonnes sœurs, son regard s'attarde longuement sur la coiffe noire et blanche des nonnes… Chanteuse sans le sou dans des cabarets minables, en révolte contre le patriarcat et la bourgeoisie de son temps, elle va canaliser son désir de revanche sociale et personnelle dans l'invention de vêtements qui libèreront la femme des lourdeurs froufrouteuses et des corsets étouffants. Une démarche à l'opposé de la pesanteur scénaristique et cinématographique d'Anne Fontaine, qui explique et souligne tout, ne laisse aucun vide ni dans les plans, toujours sagement centrés sur l'action, ni entre les scènes. Cet académisme est donc un pur contresens, et le film ne vaudrait pas plus qu'un téléfilm gonflé s'il n'était servi par un casting qui, lui, ose le contre-pied. Audrey Tautou, Benoît Poelvoorde (époustouflant !) et Emmanuelle Devos possèdent ce naturel un peu gauche qui insuffle de la vie sur l'écran, là où la démarche d'Anne Fontaine n'est qu'une patiente stratégie d'embaumement. CC


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