Livres ouverts

Événement / La troisième édition des Assises Internationales du Roman auscultera de nouveau les enjeux de l'écriture romanesque contemporaine tout en proposant des détours par les sciences humaines ou la musique. Yann Nicol


Pour sa troisième édition, la Villa Gillet et Le Monde, coorganisateurs de l'événement, ont choisi d'apporter quelques retouches tout en conservant ce qui constitue le cœur des Assises Internationales du Roman, à savoir les nombreuses tables rondes thématiques en présence de romanciers français et internationaux. Des écrivains très reconnus, comme l'Israélien Aharon Appelfeld, l'Egyptien Gamal Ghitany ou le Britannique Hanif Kureishi côtoieront des plumes émergentes, telles l'Allemande Juli Zeh ou le Colombien Antonio Ungar, pour des discussions abordant des thèmes très divers. Parmi les tables rondes les plus alléchantes, on retiendra notamment les rencontres entre Hanif Kureishi, Siri Hustvedt et Michel Schneider autour des livres dont le «psychanalyste est le héros», mais aussi celle qui réunira les très expérimentaux Véronique Ovaldé, Toby Litt, Sergi Pamies et Arnon Grunberg (son premier livre traduit en français, Le Messie Juif, était un véritable bijou d'impertinence et de drôlerie) autour des «déformations de la réalité». Mais il y aura aussi de quoi faire du côté de l'«enquête littéraire» (avec notamment le roman de Philippe Vasset consacré aux marchands d'armes), des «portraits d'une génération» (avec Annie Ernaux) ou de «la puissance de la nature» (ne ratez pas la présence du grand romancier du Montana, Rick Bass). Notons aussi la programmation de deux tables rondes consacrées à la littérature britannique et à la (re)traduction, qui réuniront, non pas des écrivains, mais des journalistes, des éditeurs, des agents littéraires, des universitaires et des traducteurs, dont le français Bernard Hœpffner, qui vient de donner une nouvelle traduction des textes de Mark Twain, Les Aventures de Huckleberry Finn et Les Aventures de Tom Sawyer, que Denis Podalydès lira le samedi 30 mai à destination du (jeune) public.Badiou, Jullien et les autres
Outre ces tables rondes, Les Assises Internationales du Roman reconduisent deux rendez-vous déjà expérimentés lors de la précédente édition : les séances «Vu d'ailleurs», durant lesquelles un écrivain étranger aborde l'œuvre d'un auteur français du patrimoine (Will Self avec Louis-Ferdinand Destouches et Colum Mc Cann avec Émile Zola) et la «petite conversation avec des revenants», pendant laquelle l'Haïtien Dany Laferrière commentera les archives d'émissions littéraires de l'INA qui seront projetées sur grand écran. Parmi les nouveautés de l'année, notons le «Petit déjeuner au musée» en compagnie du romancier Français Stéphane Audeguy, qui livrera son interprétation de la sculpture de Rodin, La Tentation de Saint-Antoine, ainsi que le rendez-vous nocturne, «Les Fous du soir», où l'on retrouvera, à partir de 23h30, des écrivains comme William Marx ou Camille de Toledo pour des séances plus confidentielles. Mais le véritable changement de cette nouvelle édition est sans conteste l'ouverture réalisée par les Assises vers d'autres domaines que le roman, et notamment les sciences humaines. Le philosophe Alain Badiou donnera ainsi un entretien à Jean Birnbaum durant lequel il explorera l'œuvre d'auteurs phares comme Mallarmé, Brecht ou Sartre. Une manière, pour l'auteur de De quoi Sarkozy est-il le nom ?, de montrer que la littérature est aussi un fabuleux outil pour comprendre le monde, et les hommes. Un autre philosophe, François Jullien, sera présent aux Assises pour un débat avec l'écrivain chinois Yu Hua autour de l'histoire récente de la Chine et des liens entre les cultures chinoises et occidentales, tandis que le psychanalyste britannique Adam Philips (auteur de nombreux livres autour de Freud et d'un ouvrage de référence sur la pensée du psychanalyste britannique Donald Winnicott) mettra «le roman sur le divan» lors d'un entretien avec Paul Holdengräber. Si vous ajoutez à cela un récital littéraire de Pascal Quignard en compagnie du pianiste Alain Planès, ainsi qu'un entretien avec le poète et musicien autrichien Alfred Brendel, vous comprendrez que les Assises Internationales font cette année quelques infidélités au genre romanesque…


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