Hôtel Woodstock

D'Ang Lee (ÉU, 2h02) avec Demetri Martin, Emile Hirsch, Liev Schreiber…


Le cinéphile français attaché à la politique des auteurs ne peut qu'être désorienté par le parcours du tandem Ang Lee/James Schamus (son scénariste attitré). Sans véritable thème (sinon, et encore, l'homosexualité), sans style visuel défini (avec des grands écarts entre la sophistication formelle de Hulk et la sobriété romanesque de Lust, caution), ces deux-là sont des caméléons promenant leur cinéma à travers le monde, les genres et les budgets. Hôtel Woodstock surfe ainsi sur la vague des 'feel good movies', avec une pointe de Wes Anderson en prime. Surprise : ce cocktail est franchement plaisant, et même euphorisant. Traitant le mythique festival de rock par le petit bout de la lorgnette (une famille juive coincée dont le fils pense effectuer une bonne affaire en faisant venir la manifestation dans la petite ville sans histoire où ses parents tiennent un hôtel), jusqu'à en éclipser toute image de concert, Hôtel Woodstock raconte l'anecdote et laisse la légende au documentaire de Michael Wadleigh, dont le film plagie les scories visuelles avec un certain brio. Évidemment, l'un n'est jamais très loin de l'autre : le vent de liberté (et de marijuana) va souffler sur ce foyer conservateur et névrosé, restaurant la libido des parents et révélant l'homosexualité du fils (incarné par l'inconnu mais pas pour longtemps Demetri Martin). Quand au spectateur, c'est surtout la bonne humeur générale du film et ses nombreux détails pittoresques qui l'emportent : Liev Schreiber en travelo-agent de sécu, Paul Dano en hippie sous LSD, ou encore la peinture assez ironique des organisateurs en rockers-businessmen entourés de costards cravates l'œil rivé sur le tiroir-caisse… L'objectif est donc atteint : on sort de cet Hôtel Woodstock en s'y sentant mieux que quand on y est rentré. 

Christophe Chabert


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