«Des espoirs à bon marché»

Entretien / Adeline Joly était chargée d'enseignement dans le parcours ‘Métiers des arts et de la culture' de la licence d'anthropologie à Lyon jusqu'en juin dernier. Propos recueillis par Nadja Pobel


Petit bulletin : Quel est l'état d'esprit des étudiants qui se présentent à ces formations ?
Adeline Joly : Ils n'arrivent pas avec des espoirs incroyables. Depuis quinze ans, je suis dans les jurys de candidature et je trouve les étudiants de plus en plus modestes. Ils sont également peut-être plus objectifs car ils savent que le marché de l'emploi est bloqué en particulier dans le domaine culturel, ils savent aussi qu'il y a moins de crédits dans la culture qu'il y a quelques années. Les étudiants ont donc des espoirs «cheap», touchants, à bon marché. Si certains croient encore sauver le monde par la culture au début de leurs études, la formation leur ôte rapidement leur naïveté !Pourquoi le marché de l'emploi de la culture est-il bloqué selon vous ?
On est arrivé aux limites du système ‘humaniste' qui consiste à vouloir appréhender tous les savoirs. Les masters culturels généralistes sont importants, mais chacun propose un peu toutes les matières, ils ne distinguent pas les uns des autres et il y a donc un risque de confusion, d'où certainement la volonté du ministère d'une plus grande lisibilité de ces parcours. Les formations culturelles, créées il y a une vingtaine d'années en France, ont contribué à former tous les professionnels de la culture que ce soit via les universités voire les écoles privées ou même les écoles de commerce. Les professionnels issus de ces formatons, initiales ou continues, publiques ou privées, sont aujourd'hui en poste. D'ici à ce que cette génération soit à la retraite, il peut encore couler de l'eau sous les ponts ! Quand on regarde ce que sont devenus les diplômés de ces dernières années, on constate qu'ils ont trouvé du travail mais il faut voir quels types de postes : ce sont des CDD ou des emplois aidés. Nombreux sont ceux aussi qui galèrent avec des postes payés au smic alors qu'ils ont un bac + 5 voire plus ou qui changent de filière.


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