Querelle

Rainer Werner Fassbinder Gaumont vidéo


Dans la foulée de sa reprise en salles (où son cinémascope flamboyant trouve toute sa pleine dimension…), le dernier film de Fassbinder sort enfin en DVD en France. Son réalisateur, alors cocaïné jusqu'aux yeux — son projet suivant devait essayer de retranscrire sur l'écran cette «expérience» — adapte le roman Querelle de Brest de Jean Genet, où un docker découvre conjointement son homosexualité et ses pulsions homicides. Si le film n'y va pas par quatre chemins pour représenter cette matière-là, notamment lors d'une impressionnante séquence de sodomie d'abord subie, puis libératrice, c'est ailleurs que Fassbinder transcende son cinéma. En reconstituant un port de Brest fantasmatique en studio dans des couleurs irréelles et sublimes, en (homo)érotisant les corps jusqu'à en faire des œuvres d'art (le film n'hésite pas à souligner son tribut à la mystique du Christ supplicié), Querelle participe à la révolution avortée d'un cinéma de l'image absolue qui a planté quelques films malades au début des années 80 (Coup de cœur de Coppola ou La Lune dans le caniveau de Beineix). Si Fassbinder fait mieux, et si son film a si peu vieilli, c'est parce qu'il garde du reste de son œuvre un regard tout à fait unique sur ses acteurs (Brad Davis, revenu de Midnight express, y trouve son deuxième et dernier grand rôle) et une empathie réelle avec le monde qu'il décrit. CC


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Irène