Les berges débordent

Actu / L'arrivée du froid ravit les riverains des Berges du Rhône, exaspérés par les débordements des noctambules. Quelles sont les leçons tirées par un nouvel été, comment les élus gèrent-ils cette épineuse question ? Dorotée Aznar


«Depuis mon élection, j'ai connu deux étés. Le premier a été très problématique, le second marque une nette amélioration de la situation». Thierry Philip, le maire du 3e arrondissement doit faire face à de multiples nuisances générées par les afflux massifs de noctambules sur les Berges du Rhône et à l'exaspération des riverains. Quatre problèmes majeurs se sont posés depuis l'aménagement des Berges : les nuisances sonores générées par les péniches, le stationnement des véhicules sur le «haut» des Berges, les «concerts» improvisés à toute heure près de l'amphithéâtre et enfin la situation dans les rues adjacentes où, à partir de quatre heures du matin, les fêtards vont assouvir leurs besoins, se vider du trop-plein d'alcool ou se défouler sur les véhicules stationnés… Selon l'élu, deux des questions ont aujourd'hui trouvé une réponse : «Tout d'abord, une charte de la vie nocturne devrait être signée très prochainement avec les péniches qui, dans leur grande majorité, nous aident, en refusant par exemple de vendre de l'alcool aux gens qui sont sur les Berges. Ensuite, le stationnement a été interdit sur le haut des Berges avec la création de zones réservées aux pompiers et une mise en fourrière immédiate des véhicules des automobilistes récalcitrants». Une mesure plutôt efficace, aux dires des riverains. Gardiens de zoo
Il reste aujourd'hui deux problèmes à régler. Celui de l'amphithéâtre, situé en face de la place Jutard, où en dépit de la décision (d'ailleurs controversée) de confisquer les instruments de musique cet été et d'un nombre important de contraventions, le phénomène d'alcoolisation majeur se poursuit. «Nous avons distribué des documents de prévention, mais nous sommes très préoccupés ; un jour il y aura un mort à cause de l'alcool», s'inquiète le maire du 3e. Il plaide pour que les commerces situés à proximité des Berges n'aient pas le droit de vendre de l'alcool, «même ceux qui ont déjà reçu les autorisations, il faut leur enlever». Pour faire revenir le calme, c'est donc la manière forte qui a été employée : une présence policière accrue et même le recours à des services de sécurité privés. «Nous avions des privés avec des chiens, mais c'est illégal et nous devrons donc supprimer cette surveillance», regrette Thierry Philip bien décidé pourtant à «ne rien lâcher». «Les effectifs de la police nationale ne sont pas suffisants la nuit, il faudrait pouvoir organiser des descentes vers trois heures du matin», insiste-t-il. Il imagine aussi la présence de médiateurs, qui pourraient tenter de canaliser les noctambules…Action, réflexion
Manque de toilettes (les seules présentes sont mixtes), de poubelles, nuisances sonores… Les Berges sont un exemple de projet urbain qui a fait l'impasse sur l'anticipation des conséquences engendrées par des attroupements massifs en plein cœur de la ville. On pourra dire pudiquement, comme à la mairie centrale, que «les Berges ont été dépassées par leur succès» ou constater que prétendre être à la fois une ville étudiante, une ville jeune où il existe une vie la nuit tout en respectant la tranquillité des riverains ne s'improvise pas. «A posteriori, on se dit qu'un endroit comme l'amphithéâtre aurait du être installé dans la partie des Berges située dans le 7e arrondissement, là où il n'y a pas d'habitations. Ou au mois, on aurait pu penser des systèmes comme un déclenchement d'arrosage automatique à partir de une heure du matin qui aurait évité les attroupements. Mais aujourd'hui, tout cela coûterait trop cher à créer, il faut faire le pari de l'éducation, de la prévention et de la répression», analyse Thierry Philip.Enfer et paradis
Les Berges du Rhône devenues un enfer nocturne pour les riverains, sont extrêmement prisées des Lyonnais. Ainsi, 200 000 personnes peuvent y être comptabilisées les week-ends d'affluence tandis que les «gêneurs» ne représentent «pas plus de 500 individus», selon Thierry Philip. «Ce lieu reste la fierté du troisième arrondissement et je suis optimiste pour l'avenir», affirme l'élu. «Les Berges, c'est un enchantement et un calvaire», conclut Janie Den Boer, résidant près des Berges qui voit d'un bon œil le thermomètre baisser.


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