ARNAUD FLEURENT-DIDIER

La Reproduction Columbia/Sony Music


Depuis le temps qu'il éveille la curiosité, Arnaud Fleurent-Didier est à classer dans la caste de ces popeux qui voyagent en solitaire sur un chemin escarpé avec vue lointaine sur l'autoroute, ces types survolant la chanson française comme De Gaulle était au-dessus des partis – les Julien Baer, Florent Marchet, Pierre Lapointe, JP Nataf. Avec son single "France Culture", en écoute sur le net bien avant l'album, il avait carrément interloqué. Difficile d'ailleurs de ne pas retenir de cet album que son prodigieux morceau d'ouverture, déboulé en plein débat sur l'identité nationale et le ridiculisant d'entrée : un spoken word symphonique comme inventaire d'une éducation, d'une reproduction, au sens bourdieusien du terme. Comme chez Baer (Julien, mais aussi pourquoi pas son frère Édouard), on est ici toujours à cheval entre ironie fine et désespérance masquée du premier degré. Entre effleurement et questionnement en profondeur, solde de Mai 68 et odeur des filles après l'amour, histoire familiale et roman national. Le tout porté par le souffle d'orchestrations nostalgiques, comme sorties d'une BO de film 70's, en tout cas d'un autre temps. Car AFD c'est le genre à mettre en musique, façon OSS 117, le discours enflammé de Dominique de Villepin à l'ONU, pour en saisir ce lyrisme vieille France également à l'œuvre sur "La Reproduction". Un lyrisme un peu fat dont on ne sait trop s'il prête à rire ou à pleurer. Dans le doute, on fait les deux. SD


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