Achille et la Tortue

De et avec Takeshi Kitano (Japon, 1h59) avec Kanako Higuchi, Kumiko Aso…


On commençait à perdre patience devant le cinéma de Takeshi Kitano, surtout après l'avoir autant admiré. Lancé dans une trilogie sur les affres de la création artistique, il avouait en creux une perte d'inspiration qu'il entendait pallier en mettant son œuvre en abyme. Redondants, contemplatifs à l'excès, mis en scène sans passion, Takeshis et Glory to the filmmaker se faisaient les reflets occasionnellement désagréables d'un artiste en pleine déconfiture, rejouant sa filmographie sans entrain particulier, se réfugiant dans des élans comiques qui sentaient franchement le sapin. Joie : l'ultime volet de cette trilogie redresse la barre, et renoue avec ce qui faisait cruellement défaut à ses deux prédécesseurs – l'émotion. Achille et la Tortue nous évoque par petites touches la vie d'un peintre loser, interprété dans la dernière partie par Kitano lui-même, qui s'escrimera durant toute sa carrière à chercher son identité à travers ses toiles, les conseils contradictoires qui lui seront prodigués, les femmes qui tenteront de l'inspirer. D'une trame en marabout de ficelle, Kitano tire tout le potentiel poétique, ludique (les différentes méthodes employées par Machisu valent leur pesant), excave une belle tristesse ponctuée d'une note d'espoir bienvenue. Achille et la Tortue, même s'il ne signe pas la révolution de son cinéma qu'on aurait pu espérer, éclaire la trilogie de Kitano d'un sursaut de vitalité artistique qu'on pensait définitivement perdu.

FC


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