Un Russe peut en cacher un autre

À l'Opéra de Lyon, chaque printemps, un Festival éclot. Impulsé par Serge Dorny dès 2003, ce rendez-vous séduit par son originalité, ses prises de risques artistiques et la variété des propositions musicales. Pascale Clavel


Cette saison, l'Opéra de Lyon annonce un Festival Pouchkine. On peut s'en étonner, même si l'homme est le plus grand écrivain russe du XIXe siècle, il n'est pas compositeur. Par ce choix, Serge Dorny a certainement voulu montrer à quel point le père de la littérature soviétique a en revanche été la source d'inspiration de compositeurs d'exception. Ce Festival s'annonce prometteur : en plat de résistance, trois des plus grands opéras de Tchaïkovski d'après des œuvres de Pouchkine. Mazeppa, Eugène Onéguine, La Dame de Pique viendront redire, par des éclairages divers, l'errance humaine la plus radicale. En périphérie, le public pourra entendre des Mélodies russes ainsi que les scènes dramatiques Mozart et Salieri de Rimski-Korsakov, toujours d'après Pouchkine. On l'a compris, l'écrivain russe reste l'épicentre du Festival. Tchaïkovski, quant à lui, est le compositeur romantique à part qui ne regarde ni du côté du groupe des cinq dont faisaient pourtant parti Borodine ou encore Rimski-Korsakov, ni vers l'incontournable Wagner. On est toujours ébahi par ses larges architectures orchestrales comme par ses récitatifs étonnamment mélodiques.Jeune chef et vieux loup des plateaux
Le choc entre ces deux romantiques est déjà immense, mais il faut ajouter à cela un duo d'une qualité époustouflante. Peter Stein à la mise en scène et Kirill Perenko à la baguette ne peuvent que transcender ces trois opéras qui ont déjà en eux une belle et propre densité. Peter Stein, depuis les années 70 et ses fameuses mises en scène à la Schaubühne de Berlin, ne se présente plus. Des plus grands théâtres aux scènes lyriques les plus prestigieuses, c'est sa vision radicale, inattendue et puissante sur laquelle on vient se fracasser chaque fois. Quant à Kirill Petrenko, déjà bien connu à l'Opéra de Lyon, il est un jeune chef si talentueux qu'il est pressenti pour diriger le nouveau Ring à Bayreuth en 2013. «J'ai confié tout de suite le projet à Peter Stein et Kirill Petrenko. Il y a eu une grande complicité. Ils ont une lecture extrêmement complémentaire, le travail de l'un soutient le travail de l'autre. Ils sont d'accord sur la notion musicale et théâtrale. Et puis, Stein est une légende pour le théâtre comme pour l'opéra», explique Serge Dorny. Pouchkine, Tchaïkovski, Stein, Petrenko, un quatuor gagnant. L'opéra a d'ailleurs décidé de rester dans la même logique la saison prochaine avec la trilogie Mozart : un même chef, un même metteur en scène et la même équipe de chanteurs.Festival Pouchkine
À l'Opéra de Lyon du jeudi 29 avril au vendredi 21 mai.


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