Une saison en enfer


Danse / La saison 2010-2011 de la Maison de la Danse regorge de grands spectacles a priori bien ficelés et attrayants : un "Lac des Cygnes" par le Ballet de Perm, du cirque venu du Vietnam ou signé Aurélien Bory, la spectaculaire compagnie Momix... Mais cette saison a aussi une face plus sombre, plus érogène et plus osée qui, bien sûr, retient davantage notre attention... C'est notamment l'adaptation de "L'Homme à tête de chou" de Gainsbourg, interprété par Bashung juste avant sa disparition, et chorégraphié par le formidable Jean-Claude Gallotta, dont la gestuelle aux affects bruts et intenses n'hésite pas à s'aventurer jusqu'aux émois du sexe. C'est aussi la jeune chorégraphe Perrine Valli qui «pense comme une fille enlève sa robe» en hommage à Georges Bataille et en réflexion sur la prostitution, que l'on pourra découvrir dans la petite salle du Studio Jorge Donn (où l'on fait toujours d'intéressantes trouvailles). C'est encore la forte présence de l'école flamande avec la dernière création de l'inclassable et baroque Sidi Larbi Cherkaoui, un solo de Jan Fabre pour sa nouvelle égérie Artemis Stavridi à propos du suicide, un autre solo signé Lisbeth Gruwez (ex égérie de Jan Fabre qui, décidément, les collectionne) très rock et bestial... Enfin, il y a ces grands chorégraphes à qui l'on pardonne tous leurs péchés : péché d'esthétisme parfois chez Christian Rizzo capable par ailleurs de tant de trouble et de tension, péché d'infantilisme chez Wayne McGregor qui peut tour à tour s'embourber dans "Kirikou" et signer des pièces personnelles incroyablement percutantes, péché de castagnettes chez Israel Galvan qui en réalité tord le flamenco dans tous les sens et toutes les excentricités jusqu'à danser sur du free jazz, du hard rock, ou exécuter son zapateado final dans un cercueil ! Jean-Emmanuel Denave


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