L'être humain et le réverbère (Big Cheese Records)

Rocé


L'être humain et le réverbère, troisième disque du rappeur français Rocé, métisse par ses origines et ses influences culturelles, est un album dense et captivant. Via un rap mâtiné de soul et de jazz, Identité en crescendo, son précédent opus, affirmait violemment la « rage et la haine » d'un homme qui assume son identité de « métèque, [...] étudiant noir, rappeur blanc » face au déni de la société. L'être humain et le réverbère reste fidèle à cet esprit et va plus loin. Rocé propose toujours des productions sophistiquées et rythmées, mais enrichies cette fois d'une coloration orientalisante. Pour autant, l'ambiance déclinée en 12 pistes est loin d'être uniforme : en témoignent le titre acidulé L'objectif, en duo avec Hayet, ou encore Au Pays de l'égalité, qu'il partage avec un chœur d'enfants. Sur ce son plus amer que doux, Rocé scande tantôt froidement, tantôt rageur, des textes élaborés et d'une lucidité bluffante. La vie des quartiers, la violence de la ville, l'incohésion sociale lui donnent « envie de vivre sa vie dans la brousse ». Aucune concession de la part du rappeur, qui dresse des portraits désillusionnés aussi bien de la cité que des nantis. Le monde est terne à ses yeux, au point que « dans la rue [il confond] l'être humain et le réverbère ». La ville est un milieu hostile. La ville, et ses riches dont « les beaux quartiers et leur beauté montrent un horizon tout aussi bétonné » que celui des les rappeurs, dont il dresse le pamphlet plutôt que le portrait dans le détonnant Si peu comprennent.Quentin Pourbaix


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