Les Secrets

De Raja Amari (Fr-Tun-Alg, 1h31) avec Hafsia Herzi, Sondos Belhassen, Wassila Dari…


Il faudrait réécrire l'article de Truffaut sur le cinéma français. On pourrait dire, notamment, que ce qui le distingue du cinéma américain, plutôt tourné vers l'action (au sens descriptif, historique et politique), tient au fait qu'ici nous préférons un cinéma des idées. Et on pourrait prendre pour illustrer, par exemple, Les Secrets de Raja Amari, puisqu'on l'a sous la main. Pour son second film, la réalisatrice, d'origine tunisienne mais ex-élève de la Fémis (donc un peu française), passe son temps à filmer une idée. Celle que le titre résume tel un paradigme. Les Secrets est donc un film sur les secrets, autant dire un pléonasme. Problème : Raja Amari pense que sa mise en scène sert et justifie la démonstration de cette idée. Qu'elle spatialise à travers une maison étrange et le corps de trois femmes, sur plusieurs générations, vivant dans l'anonymat, cachées, sous la coupe quasi carcérale de la plus âgée. Rien de sociologique, heureusement. Plutôt l'envie de tutoyer le film de genre, tout en élaborant un cinéma théorique, plastique, sensible, féminin. Sauf qu'au troisième plan, la cinéaste a tout dit. Le reste n'étant qu'une illustration des tensions et frustrations dont les personnages sont les vecteurs. Au mieux, Les Secrets est donc un faux remake des Autres par une apprentie Claire Denis.

Jérôme Dittmar


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