Images inquiétantes


Depuis la critique de l'art dit «rétinien» par Marcel Duchamp, depuis la fronde contre la société du spectacle de Guy Debord, depuis la critique de la représentation par de nombreux théoriciens et philosophes, l'image n'a pas très bonne presse auprès des artistes contemporains, en France tout particulièrement (où, jusqu'à récemment, la peinture et le dessin étaient considérés comme «ringards»). Axel Sanson (né en 1975, installé à Provins), lui, n'en a cure et met les deux yeux dans le plat des écrans d'ordinateur, de cinéma ou de son appareil photo... Chaque jour, il fait défiler des milliers d'images issues de blogs internet, de films des années 1970-80, de prises de vue personnelles lors de soirées entre amis. Il sélectionne celles qui lui paraissent les plus «bizarres», «étranges», «équivoques», «ambiguës»... Et il compose à partir de ces images des tableaux, soulignant la fragilité ou l'inquiétante étrangeté des situations représentées : couples qui se disloquent insensiblement, jeunes femmes qui s'absentent à elles-mêmes en fumant une cigarette ou en buvant un verre d'alcool, gestes triviaux qui basculent dans l'angoisse ou le non sens... Les toiles d'Axel Sanson sont peintes avec beaucoup de nervosité dans des gammes de gris colorés, elles négligent le dessin et la précision des formes, et jouent surtout d'atmosphères troubles, blafardes, à la limite parfois de la confusion. Chaque œuvre a pourtant un effet de réel immédiat. Et c'est bien là le piège que tend Axel Sanson au spectateur : ces toiles figuratives, d'emblée compréhensibles et reconnaissables, voire séduisantes, se creusent ensuite peu à peu de mystère, de vulnérabilité, d'étrangeté. Quelque chose manque, quelque chose se délite, quelque chose tremble. Le monde est fragile, ses modes de représentation (images, fictions, etc.) aussi. JEDAxel Sanson, Storytelling
À la galerie Françoise Besson jusqu'au 24 juillet.


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