Rentrée des artistes

Expositions / Cet automne, les musées exposent des artistes actifs aussi dans les domaines de la danse ou de la littérature. Et les galeries fourmillent de jeunes talents à découvrir et de figures plus connues à redécouvrir. Jean-Emmanuel Denave


Cette nouvelle saison artistique débute très tristement avec la disparition, début septembre, de Jean-Louis Maubant. Ce grand monsieur de l'art contemporain avait fondé, en 1978, avec une poignée de passionnés, ce qui allait devenir peu à peu l'Institut d'art contemporain de Villeurbanne. Ce centre d'art pionnier a accueilli entre ses murs quelque 140 expositions et les plus grands artistes de ces trente dernières années comme Martha Rosler, Jeff Wall, On Kawara, Anish Kapoor, Yan Pei-Ming, Gordon Matta-Clark... En 2006, Nathalie Ergino succédait à Jean-Louis Maubant lors de son départ à la retraite. Et poursuit, depuis, la «politique maison» d'expositions exigeantes et souvent de grande qualité (on se souvient notamment de celle de Michel François l'an dernier, superbe !). Cet automne, l'IAC exposera en parallèle deux personnalités plutôt connues pour leur travaux littéraires, mais en réalité totalement inclassables. Le poète et écrivain subversif Brion Gysin (1916-1986), proche de William Burroughs et inventeur du «cut-up», donnait aussi dans la peinture et a créé une fameuse Dream Machine (1961), installation censée procurer des visions au spectateur qui l'expérimente les yeux fermés ! Venue de New York, cette première rétrospective consacrée à Gysin rassemblera des dessins, des toiles, des œuvres sonores, des films et... la Dream Machine. Parallèlement, l'électron libre Jean-Charles Masséra présentera des courts métrages, des chansons, des photographies, et des interventions dans l'espace public. L'auteur de "We are l'Europe" s'infiltre à l'IAC, comme dans ses livres, parmi les formes et les formulations des discours dominants (communication, économie, politique, médias...) pour mieux leur tordre le cou. C'est souvent très drôle et, surtout, fort stimulant pour la pensée critique.Danse au musée
Le Musée d'art contemporain accueille lui-aussi cet automne des artistes «pas comme les autres». Avec, en premier lieu, Trisha Brown, figure de proue de la «post-modern dance» américaine. La chorégraphe s'est régulièrement aventurée à la lisière des domaines de la danse et des arts plastiques : en collaborant souvent avec des plasticiens (Robert Rauschenberg au premier chef), en proposant des performances, en créant elle-même des dispositifs ou des dessins... Autant de facettes que l'on retrouvera dans l'exposition du MAC (dessins, vidéos, installations). Simultanément, le musée expose Olivier Mosset et ses mises en abyme de l'art ; une vingtaine de très jeunes artistes chinois fans de manga ; le célèbre artiste américain Bruce Nauman, à travers des vidéos où il expérimente le son, le corps, le geste trivial et répété... Plus «classique», le Musée des Beaux-Arts nous invite à découvrir un peintre méconnu du XVIIe siècle, Louis Cretey. Mais méfions-nous des idées préconçues, car l'artiste pourrait s'avérer un peintre précurseur du modernisme avec ses scènes profanes ou religieuses traitées avec hardiesse, sens du drame, voire de manière quasi hallucinée... Le Musée Dini de Villefranche revisite, lui, le Symbolisme de la fin du XIXe siècle, mouvement littéraire et artistique impulsé entre autre par J-K. Huysmans et Gustave Moreau. L'exposition rassemblera des œuvres de Puvis de Chavannes, Fantin-Latour, Pierre Combet-Descombes...Ronde des galeries
Du côté des galeries et des petits centres d'art, beaucoup accueillent la biennale Lyon Septembre de la Photographie. Les autres ne sont pas en reste et promettent de belles découvertes. Comme la galerie Domi Nostrae qui exposera successivement la jeune Italienne Vania Comoretti (des portraits en polyptyque, traités à la Lucian Freud sans concession à l'esthétisme), et le peintre d'origine chinoise Sha Zijian. Son étrange «théâtre du silence» place des individus esseulés au milieu de paysages naturels dans une atmosphère entre rêve et cauchemar. Non figuratif quant à lui, l'univers du dessinateur et peintre parisien Stéphane Guénier nous avait beaucoup marqué lors d'une exposition collective. Ses tâches, biffures, traces et signes épars «parlent», avec une intensité rare, directement aux nerfs du spectateur. La galerie Henri Chartier organisera sa première exposition personnelle à Lyon. Autres rendez-vous à ne pas manquer : les dix ans du centre d'art Néon avec une joyeuse série d'événements «flashs», des performances, des expositions (dont l'une avec Daniel Firman) ; le surréaliste Jean-Claude Silbermann à l'URDLA ; l'ex artiste de Supports-Surfaces Pierre Buraglio à la galerie Martinez ; le New-Yorkais Tim White-Sobieski pour une exposition tout en effets lumineux et sonores à la galerie Houg... Une liste très loin d'être exhaustive !


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