L'uppercut !

Danse / Pour sa nouvelle création, Mourad Merzouki revient à ses premières amours : les arts de combat qu'il mêle au cirque en n'oubliant pas le hip-hop. Avec "Boxe Boxe", il ne renie rien de son parcours et l'enrichit aussi de la présence sur scène du détonnant Quatuor Debussy. Nadja Pobel


Baignée de noir, la scène s'illumine doucement pour laisser poindre quelques étoiles. Des hululements sont les premiers sons de la nouvelle création de Mourad Merzouki avant que ne se fasse entendre Schubert par le quatuor Debussy (deux violons, un violoncelle, un alto). Nous sommes loin de la folle énergie qui se dégageait de l'incroyable spectacle "Agwa" ou de son jumeau dansé par des Brésiliens, "Correria". "Boxe Boxe" est une pièce de cordes, celles du ring, et celles travaillées par les musiciens sur leur instrument. C'est une partition qui ramène le chorégraphe de Käfig au sens premier de la signification du nom de la compagnie en allemand et en arabe : la cage. Au commencement, les corps des danseurs sont prisonniers, condensés dans une cage-ring. Seuls des gants de boxe tendus au bout de leurs bras en dépassent et entament une chorégraphie, comme des marionnettes. Suivent des duos clownesques où Merzouki délaisse le travail physique intense au profit d'un découpage des gestes, comme un film muet au ralenti. De cinéma, il est d'ailleurs question tout au long du spectacle qui utilise l'impressionnante ouverture et profondeur de scène de la Maison de la danse. Les musiciens évoluent sur des chaises à roulettes dotées d'un immense dossier en fer forgé. Il n'en faut pas plus pour que ne plane l'ombre de Tim Burton.En rouge et noir
Dans la deuxième moitié de "Boxe Boxe", le hip-hop retrouve toute sa place. Les boxeurs-danseurs occupent la scène ensemble pour un somptueux jeu avec leur punching ball sur la musique du fidèle groupe AS'N. Et la preuve est faite qu'en s'aventurant sur le terrain des arts martiaux et du cirque, Mourad Merzouki n'a rien perdu de sa superbe qui l'a menée de ses premiers pas de hip-hop dans la rue à l'une des plus grandes scènes européennes dédiées à la danse. Le chemin parcouru est éblouissant. Merzouki peut désormais faire des clins d'œil avec humour aux critiques de danse qu'il moque gentiment à travers la figure de l'arbitre, un culbuto obèse, engoncé dans un costume rouge et noir. Une fois de plus, Mourad Merzouki et sa troupe signent une création d'une générosité rare où il n'y a que des premiers rôles, les musiciens se confondant avec les danseurs, faisant oublier le sérieux qui parfois accompagne la musique classique. Sous leur queue de pie, les musiciens du quatuor Debussy portent le pantalon du costume de Monsieur Loyal. Tout un symbole !"Boxe Boxe"
Jusqu'au samedi 9 octobre, à la Maison de la danse.


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