Les voix humaines

Rencontre / Jeudi 30 septembre, la Ville Gillet propose une rencontre autour de trois jeunes auteurs qui publient leurs premiers romans en cette rentrée. Dorotée Aznar


La folie, la filiation, l'enfermement. La saison de rencontres de la Villa Gillet s'ouvre avec une soirée consacrée aux premiers romans, sous titrée «premières voix». Des voix qui se distinguent par leur diversité et leur singularité. Celle de Violaine Schwartz dans La Tête en arrière est répétitive, saccadée, obsessionnelle. Elle nous entraîne dans la chute d'une cantatrice au chômage, installée dans un pavillon de banlieue parisienne avec son mari et sa fille. Une maison du bonheur léguée par ses beaux-parents qui se transforme en prison et en couveuse de choix pour les obsessions de la jeune femme. Peu à peu, elle se laisse ronger par les tracas quotidiens et la paranoïa, en se préparant vainement pour une audition de l'opéra de Poulenc La Voix humaine tout en épiant son sous-locataire gabonais qu'elle soupçonne des pires crimes. Une écriture pleine d'angoisse et de blancs, schizophrène et nerveuse, angoissante et drôle. La voix d'Anne Berest, plus sereine, n'en est pas moins intéressante. Avec La Fille de son père, la jeune romancière nous plonge dans une histoire familiale a priori banale. Trois sœurs, que le temps a fini par éloigner, une mère décédée trop tôt et un père qui tente tant bien que mal de faire bonne figure devant sa nouvelle compagne que les trois petites «hyènes» s'acharnent à rejeter et qui se venge en laissant éclater un secret familial. Un secret qui pourrait détruire, mais qui pourrait aussi aider à retendre des liens distendus, à ôter leur auréole aux saintes et à mieux aimer les présents. En choisissant de confier la narration à une trentenaire un peu perdue qui cherche sa place dans sa famille et dans le monde, Anne Berest ouvre la voie sinon la plus convenue, au moins la moins inattendue de cette rencontre. Mais pas la moins savoureuse.Voix d'outre-tombe
Thomas Heams-Ogus s'intéresse quant à lui à un sujet étonnant : Cent seize Chinois et quelques raconte l'histoire des Chinois d'Italie retenus prisonniers dans des camps en raison de leur origine, dans la région des Abruzzes entre 1941 et 1943. Une page méconnue de l'Italie mussolinienne comme métaphore de l'exil et de la cruauté, mais également portée par l'espoir d'unions fugaces et inattendues, de résistances infimes et vitales. Thomas Heams-Ogus propose la voix de la description minutieuse et documentée : topographie, paysage, travaux des champs… Une voix sans violence et sans colère pour une écriture parfois un peu trop décorative. Ces trois auteurs aux voix si différentes seront réunis jeudi 30 septembre à la Villa Gillet. La rencontre sera animée par Francesca Isidori, critique littéraire à France Culture.PREMIÈRES VOIX, PREMIERS ROMANS
À la Villa Gillet, jeudi 30 septembre.


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