Passé déterré


Expo / À l'orée des années 1940, Lodz est une ville prospère qui vit essentiellement de l'industrie textile grâce à ses manufactures de coton. La ville polonaise compte aussi la plus forte concentration de Juifs parmi les villes européennes de plus de 100 000 habitants. C'est là que les nazis installent, dès février 1940, un ghetto, le deuxième plus grand de Pologne après celui de Varsovie. C'est aussi celui qui restera «ouvert» le plus longtemps, jusqu'à l'automne 1944. Rapidement, Henry Ross, lui-même Juif polonais, devient le photographe officiel du lieu pour tirer des portraits des habitants et pour alimenter la propagande. Mais il parvient également à prendre d'autres clichés. Comme cette photo prise certainement clandestinement et figurant une pendaison. La pellicule semble avoir été brûlée par endroits, l'image est floue mais reflète implacablement la réalité. Les 41 photos exposées au CHRD ont souffert, elles portent les stigmates du temps et des conditions de vie au ghetto (Henry Ross les avaient enterrées pour les protéger). Elles sont griffées, nervurées. Mais rendent compte de ces cinq années de survie, de la famine aux prisons. Dans sa dernière partie, l'exposition permet d'aborder le quotidien des Juifs avec des scènes de repas en cuisine, des baisers d'amoureux, des jeux d'enfants. Dans les espaces non aryens qui leur étaient autorisés, ces Polonais continuaient à sourire. De rafles en déportations, 95% d'entre eux ont pourtant disparus dans les camps de Chemno et Auschwitz.
Nadja PobelHenry Ross, «Photos ensevelies du ghetto de Lodz», au CHRD jusqu'au dimanche 13 février


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