Cendrillon au pays des jouets


Danse / Ils transpirent, étouffent, en bavent littéralement, les danseurs du ballet de l'Opéra derrière leurs masques à la fois poupon et étranges, et trop l'étroit dans leurs habits boursoufflés... Pour "Cendrillon", sa première création en 1985 avec le ballet de Lyon (avant "Grossland" en 1989, puis "Coppélia" en 1993), Maguy Marin ne ménage pas ses interprètes ni les fondements de la danse classique. «Je ne renie pas cette pièce même si elle est très loin de moi, à présent, que je ne suis plus trop dans cet esprit. Mais ça fait partie d'un processus. C'est un exercice intéressant de se confronter à une partition et un livret déjà écrits, ça permet de traverser des choses singulières et de passer entre elles pour exprimer autre chose, justement», déclarait-elle. La pièce de répertoire est transposée ici dans un univers de jouets, de pantins maladroits, de pantomime, où le féerique et la naïveté s'y disputent à la cruauté et aux angoisses infantiles. "Cendrillon" est un peu godiche en esquissant ses entrechats et en se raccrochant à son balai ; son prince est un peu fade et fat dans ses mouvements aux raideurs de soldat de plomb. Maguy Marin a inclus tellement d'obstacles et de difficultés dans sa pièce que celle-ci exige paradoxalement une technique d'autant plus maîtrisée. Sa critique discrète de la société de consommation (ici représentée par un grand décor de magasin de jouets) et ses moqueries humoristiques vis-à-vis des mythes classiques, n'ont pas empêché cette pièce d'être un immense et exceptionnel succès public. La musique de Prokofiev jouée par l'orchestre de l'Opéra en direct y est certainement aussi pour quelque chose... Jean-Emmanuel DenaveCendrillon de Maguy Marin, par le ballet et l'orchestre de l'opéra de Lyon
À l'Opéra de Lyon du mercredi 22 décembre au samedi 1er janvier.


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Stéphane Guénier, rencontre