Grands méchants loups


Théâtre / Un samedi soir sur un campus universitaire, dans l'appartement d'un professeur d'histoire, George, et de sa femme, Martha. Comme tous les samedis, George et Martha sont allés dîner chez le père de Martha, président de l'université. Ils rentrent tard, ivres. Mais ce samedi-là, une surprise attend George : Martha a invité leurs nouveaux voisins, un jeune et séduisant professeur de biologie et sa frêle épouse. Pour adapter la pièce à succès d'Edward Albee, le metteur en scène Dominique Pitoiset s'appuie tout d'abord sur une nouvelle traduction de Daniel Loayza. Mais il s'appuie surtout sur une distribution remarquable, capable de nous embarquer dans un jeu de massacre dont les règles changent constamment. George et Martha cherchent-ils des témoins à qui infliger le récit de leur amour déclinant ou sont-ils des loups complices dans leur recherche de chair fraîche ? Les comédiens choisis par Pitoiset (qui interprète également George) livrent toutes les facettes et toutes les nuances des personnages de la pièce, inversent les rapports de force et maintiennent une tension permanente, tout en restituant l'humour (souvent très noir) des situations. La performance des comédiens et la férocité du discours sont sublimés par une scénographie épurée figurant un appartement cossu. Devant une telle réussite, on ne peut que se demander pourquoi diable Pitoiset se pique d'insérer des projections vidéos inutiles et de saupoudrer le spectacle de musiques illustratives. Le spectateur n'a pas besoin de séquences de respiration, bien au contraire, il a envie de retenir son souffle, le plus longtemps possible. Dorotée Aznar


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Serial comédien