Obel la vie


Musique / Même si elle habite Berlin, Agnes Obel est Danoise, ce qui est une manière polie de dire qu'elle est un peu chiante. Déjà elle joue du piano, c'est un signe. Mieux, sur la pochette de son album "Philarmonics", elle pose, la mine stricte (jolie, nordique), façon portrait de l'ancêtre luthérien posé sur la cheminée quelque part dans un maison en pierre noire du Jutland. Parfois, même, elle se tape une bonne barre avec un hibou, grand-duc et roi de la vanne bien connu (c'est toujours moins convenu que les LOLcats). Mais, pour peu qu'on parvienne à écarter la présence du hibou, ce qui n'est quand même pas une mince affaire, on se laisse prendre à sa musique, à ce piano qui trottine presque parfois vers la gaudriole (telle qu'on peut la concevoir en pays luthérien, n'exagérons rien). À cette voix aussi qui enveloppe, qui cajole, réverbe les sentiments. Pour un peu, on se laisserait bien aller à s'assoupir l'air de rien, pour une micro-sieste, ni vu, ni connu : ah, on est bien chez Agnes, vas-y remets une bûche dans le poêle. Mais il y a ce piano, encore, qui martèle des mélodies qui viennent titiller le sommeil paradoxal, cette ambiance hitchcockienne qui nous laisse aux aguets, cette reprise de John Cale ("Close Watch") qui nous rattrape à deux doigts de l'éclatante lumière au bout du tunnel. La musique d'Agnes Obel a l'attrait aimantant des beautés froides et cliniques, appliquant à merveille le principe Kierkegaardien de l'angoisse comme «vertige du possible». "Philarmonics" donne ce vertige et pour tout dire, Agnes Obel, c'est mortellement beau. SDAgnes Obel + Joy
A l'Epicerie Moderne, mercredi 9 février.


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