Quand Lyon a pactisé avec Google

Marché public / La Ville de Lyon a confié à Google en 2008 la mission de numériser pas moins de 500 000 ouvrages de sa bibliothèque municipale. Premier contrat signé en France pour le puissant moteur de recherche, et premiers pas vers une polémique toujours d'actualité : la diffusion de la culture sur le net doit-elle passer par l'assise du monopole du géant américain ?


Frédéric Mitterrand évoquait en janvier 2010 de sérieux doutes sur les contrats signés entre Google et 29 bibliothèques dans le monde, dont celle de Lyon, estimant que certains étaient même «inacceptables». «Ils reposent sur une confidentialité excessive, des exclusivités impossibles, des clauses désinvoltes, voire léonines au regard du droit d'auteur», a déclaré le ministre de la Culture au journal Le Monde. Cette récente prise de position entérine le sentiment désagréable que Lyon se serait jeté dans la gueule du loup. Patrick Bazin, ex-directeur de la BM de Lyon, à la manœuvre à l'époque de la signature du contrat avec le géant américain, a toujours voulu rassurer les plus sceptiques. La BM conservera copie des ouvrages numérisés, et ses collections resteront la propriété de la Ville. L'objectif pour Google, coté en bourse à plus de 200 milliards de dollars, ne réside pas uniquement dans la belle intention de diffuser largement et gratuitement le patrimoine culturel mondial. Le projet «Google Books» permettra non seulement au géant de rester le numéro un des moteurs de recherche, car lorsqu'on voudra consulter un livre en ligne, il faudra nécessairement passer par lui, mais aussi de générer des profits par le biais de liens publicitaires. À Lyon, pas d'états d'âme. «Personne d'autre que Google n'est capable de numériser comme ça. Et ça coûte zéro à la Ville», plaide Georges Képénékian, adjoint délégué à la Culture. Sur les 500 000 livres sélectionnés par la BM dans son fonds ancien et que Google s'est engagé à numériser en moins de dix ans, 60 000 sont déjà passés dans le processus de scanner, dans un centre spécialement conçu et caché en périphérie lyonnaise. Quelques centaines sont déjà accessibles en ligne. Paul Presle


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