Sur la route


Jazz / «Talking trips to America» est un projet singulier : par le violoncelle, la photographie et le film, faire revivre, le temps d'un concert, la mémoire d'une enfance de périples à travers l'Amérique. Une enfance à la suite des pas vagabonds d'un père photographe, Lee Friedlander, qui, le temps des grandes vacances venu, prenait la route à bord d'un pick up- camping, viseur et famille sous le bras. Le fils, Erik Friedlander, en a gardé, plus qu'un souvenir, le timbre d'une musique porteuse des échos d'un pays. Comme pour rendre ce qu'a pu être ce long travelling du paysage à travers la vitre, Erik Friedlander a choisi d'accompagner sa performance solo des films de Bill Morrison, cinéaste expérimental qui pour l'occasion s'attarde sur cette improvisation saisie du monde que permet le transport moderne. La route crée en effet le surgissement des choses et le violoncelle de Friedlander sait rendre la géographie du ciel qui défile et se meut selon le kaléidoscope des nuages changeants. De son instrument, il use avec génie et liberté, et fait résonner sur ses cordes davantage pincées que frottées, la contemplation vague, le crépuscule d'été, le folklore, la route 66, les lointaines rythmiques des racines d'Afrique, enfin tout ce qu'une terre traversée peut exhaler de ce qu'elle est. Les photos de Lee Friedlander, quant à elles, apportent à cette performance une densité digne des portraits de Walker Evans, abruptes et signifiantes. D.H Lawrence, cité dans ses carnets par Jack Kerouac écrivait : «La grande maison de l'âme est la route ouverte», ce concert d'un voyage vers des destinations sans but, le long de pistes de bohèmes, nous entraîne sur ces routes d'Amérique, dans une marche à l'étoile, et rien d'autre. Mélanie VivenzaErik Friedlander
Au Périscope (Brignais)
Samedi 26 février à 21h


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