Le tube à essai de P.M. Tayou


Zoom / Après les deux étages si denses de l'exposition indienne, on croyait pouvoir se reposer un peu au troisième niveau consacré à Pascale Marthine Tayou. Erreur ! Si la première salle est un peu austère avec sa forêt de pieux suspendus comme autant d'épées de Damocles, l'espace principal s'ouvre ensuite en une sorte de jungle artistique aussi prolifique que généreuse. «Faire une exposition, c'est pour moi célébrer la vie», déclare l'artiste né en 1967 au Cameroun et ayant émigré ensuite successivement en Suède, en France, puis en Belgique. Et quelle célébration ! En couleurs, en volumes, odeurs, bruits, objets, et grands traits humoristiques... Tayou, électron libre de la mondialisation, jette une sorte de regard ethnographique sur ses racines africaines, sur l'Europe et sur sa propre histoire. Le carnaval de son village natal côtoie (sous forme de photographies) une très sérieuse cérémonie chamanique, une rangée de robes noires musulmanes voisine avec des petites vidéos de cours d'eau et de fontaine, un immense échafaudage mène à une sorte de dôme inversé constitué de sacs en plastiques... Ailleurs, de grandes photographies de paysages ou de végétations africaines sont suspendues, une myriade d'écrans clignotent en formant le mot «open», des têtes sculptées en cristal de Toscane sont accrochées à une cimaise, des cassions lumineux dévoilent une nouvelle monnaie inventée par l'artiste, «L'Afro» avec sa légende humoristique «In Pascale Marthine Tayou we trust» ! À chacun, à travers cette joyeuse accumulation, de tracer son chemin, d'écrire ses histoires. Tayou, lui, a mis entre parenthèses toute idée de jugement ou de hiérarchisation, composant cet ensemble d'objets (récupérés, achetés ou personnels), essentiellement sur des critères de couleurs et de formes. «C'est une exposition où chacun a la possibilité de devenir son propre tube à essai. Ce que je dis, c'est ce que je pense. Mais je ne suis pas différent de vous. Je suis comme vous, une partie de vous. C'est d'abord une aventure humaine». Une aventure franchement revigorante et rafraîchissante qui se poursuit aussi dans 15 lieux à Lyon : place Gabriel Péri, à l'Opéra, au commissariat du 1er, à l'église Saint-Bonaventure, dans un cabinet d'avocats... JEDPascale Marthine Tayou
Au Musée d'art contemporain et dans 15 lieux à Lyon
Jusqu'au dimanche 15 mai


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