Dans le Mills

Festival / Pour sa sixième édition, le festival Reperkusound remise un peu son côté punk au profit d'une tête d'affiche plus arty : en invitant Jeff Mills, le Double Mixte revêt le costume so(m)bre et chic du créateur d'Axis. Stéphanie Lopez


«Transgénérationnelle et cross-over», voilà les premiers mots qui viennent à l'esprit d'Éric de Mediatone lorsqu'on lui demande de nous présenter cette sixième édition. Or pour incarner cette programmation «tournée vers le passé et le futur à la fois», quelle meilleure tête d'affiche que Jeff Mills ? Depuis vingt ans que le Wizard de Detroit officie sans relâche à la pointe de la création (musicale, bien sûr, mais aussi dans les domaines de la mode et du cinéma), obsédé par les thèmes de la mémoire, de la transmission, du futur et de la science-fiction, Jeff Mills cristallise à lui seul cette volonté de réunir sur le dancefloor plusieurs générations. De tous les pionniers techno d'Amérique (Mad Mike avec qui il a fondé le mythique label UR, Robert Hood qui a oeuvré sur Axis…), Mills est peut-être le seul, en 2011, qui a réellement réussi à passer l'épreuve du temps. Persistant dans son art en s'associant aussi à d'autres formes de création, menant de front trois labels (Axis, Purpose Maker et le visionnaire Tomorrow) plus une ligne de vêtements, il embrasse et brasse dans ses flightcases vingt ans d'histoire sonore, et toujours cette volonté farouche d'aller de l'avant. Laurent Garnier dit de lui qu'il est à la techno ce que le Velvet Underground a été au rock : à la fois précurseur, fondateur et défricheur. Eric renchérit : «Jeff Mills, c'est le socle, la légende, l'un de ceux qui a rendu l'electro plus intelligente, et qui a fait évoluer son image dans le monde...»All Tomorrow's Parties
Alors quand Mediatone entend proposer «un événement qui retrace l'histoire de l'électro», qui mieux que Jeff Mills, de fête, pour faire le lien entre la tech d'hier et celle de demain ? Son label Tomorrow, qui se passionne pour les visions futuristes et les scénarii de science-fiction, œuvre en scientifique dans la quête de «sons bénéfiques à l'esprit humain, créés pour favoriser son évolution». Et preuve de sa prolifique pérennité, la compilation Tomorrow Plus X, une collection de trente vinyles blancs, s'apprête à concurrencer la sortie d'un énième album, The Power, qui dans la continuité de The Sleeper Wakes poursuit sa saga stellaire à base de sons «hallucinés ou imaginaires». Autant dire que son Dj set pour Reperkusound devrait être en phase avec l'imagerie SF du festival. Il pourrait même préfigurer la bande-son du Voyage Fantastique, un cinémix que Jeff réalisera en mai à la Cité de la Musique. Après sa BO pour Metropolis et sa sculpture Mono dédiée au 2001 de Kubrick, la galaxie Jeff Mills, plus tentaculaire que jamais, pourra même se permettre de sortir un ironique Star Systems courant mai : une autre compilation sur le thème des voyages spatiaux, alors que le Dj, lui, gère sa carrière la tête sur les épaules et les deux pieds sur terre.JEFF MILLS
Au Double Mixte, vendredi 8 avril


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