Amour (impossible) toujours

Opéra / Luisa Miller de Verdi est à l'affiche de l'Opéra de Lyon. Cette œuvre, inspirée d'un drame de Schiller, n'est que rarement jouée. Les directeurs de salles lui préfèrent Rigoletto, Aïda, Traviata plus savamment installés dans l'inconscient collectif des mélomanes. Serge Dorny a osé. Pascale Clavel


Encore un amour impossible…
Phénomène italien romantique, Verdi n'est pas qu'un simple compositeur, il est aussi celui qui jette sur scène des mélodrames en forme de témoignages précis sur l'histoire sociale, culturelle et politique de l'Italie du XIXe siècle. Si Luisa Miller marque un tournant dans l'œuvre du compositeur, il faut savoir que tous ses opéras sont liés par une intensité dramatique exceptionnelle. Dans cette époque romantique où tout bouge – démocratisation de la vie musicale, perfectionnement des instruments, nouveau statut du compositeur, pouvoir de la critique musicale – l'œuvre de Verdi est unique. Rossini, Donizetti, Puccini, Bellini… Il a pourtant de la concurrence. Nabucco, créé en 1842, est un succès ; les Italiens y reconnaissent leur propre malheur dans le fameux chant du peuple hébreu «Va pensiero». Même si l'on s'aime dans ses opéras, ce n'est plus le propos essentiel, les mots clefs ne sont plus amore, pace… mais bien liberta, patria. L'opéra n'est plus un simple divertissement, il devient un mode d'expression qui met en avant les problèmes politiques, sociétaux du moment. Le langage musical de Verdi est très simple et sera d'autant plus efficace.

Costume d'époque
Luisa Miller est composé en 1849, juste avant la célèbre trilogie populaire Rigoletto, le Trouvère et La Traviata. Puissance du sentiment amoureux qui conduit au suicide, toile de fond ultra politique, opposition des grands de ce monde et des petits, le sujet de Luisa Miller peut traverser tranquillement les siècles tant le propos est contemporain. Le chef Kazuchi Ono, qui dirige cette production, voue un amour immense à cette œuvre : «J'aime le Bel Canto, l'orchestre reste au service de la voix, pratiquement comme un accompagnement», explique-t-il. Les voix des chanteurs viennent se mêler à l'orchestre et à l'inverse, des phrasés d'orchestre montent sur scène jouer avec les voix. Les répétitions se terminent actuellement à l'Opéra de Lyon, le metteur en scène David Alden et le chef Kazuchi Ono auront-ils trouvé un terrain d'entente ? On murmure que David Alden chante la partition par cœur… Est-ce assez pour que la mise en scène soit exceptionnelle ? La soprano albanaise Ermonela Jaho, à la voix magnétique, déjà entendue à Lyon dans une très belle Traviata, tient le rôle de Luisa. Quant à Ono, on le sait à l'aise dans ce répertoire du XIXe siècle et l'orchestre sous sa baguette ne peut que servir une musique d'une rare puissance. Mais, pourquoi donc encore des costumes d'époque ?

Luisa Miller de Verdi
À L'Opéra de Lyon
Jusqu'au dimanche 1er mai


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