Sexy Sufi


Musique / Sans doute en a-t-il eu marre de prêcher dans le désert. Alors voilà, Gonjasufi est sorti de sa caravane paumée dans la pampa Mohave. Lui qui, à l'issue de son étourdissant album A Sufi & A Killer (révélation majeure de 2010), a alimenté tous les fantasmes d'Arizona Dream version Serpent Cosmique, on le retrouve cette année plus terre-à-terre, c'est-à-dire sur les planches, en tournée. Une première française pour cet ermite tout à la fois gourou hip-hop et prof de yoga. Jusqu'ici, on s'était contenté du disque, auquel on s'était piqué comme à une épine de peyotl, et on avait voyagé de violons ivres en soul ensorcelée, de transes profondes en rimes tranchantes, portées par la voix d'outre monde de ce derviche de l'ombre. Hip-hop, Gonjasufi ? Oui, si l'on considère ses accointances avec Flying Lotus et Gaslamp Killer (tous deux producteurs de l'album), son passé de MC 90's sur la scène de San Diego, à une époque où les rappeurs du coin tenaient les rênes de l'avant-garde américaine. Mais au tournant des années 2.10, sa vision «cosmicopolite» va beaucoup plus loin que son image de sorcier solaire. La preuve sur scène, où la personnalité du Sufi et du Killer peuvent s'affronter dans un tumulte extrême (son live hardcore a décontenancé plus d'un disciple aux Transmusicales De Rennes). Comme si le griot du hip-hop livrait une battle avec lui-même, Gonjasufi embrasse dans la même posture les figures contraires de la Bhagavadata – colère d'Arjuna vs sagesse de Krishna – donnant aux auditeurs, mieux qu'un cours de yoga déjanté, une séance de méditation possible sur nos parts d'ombre et le pouvoir des ondes planquées sous sa barbe vagabonde.Stéphanie LopezGONJASUFI
Au Transbordeur, mercredi 25 mai (soirée Aloha From The Desert)


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