À fond les manettes - Juillet 2011

Chaque mois, la sélection jeux vidéo du Petit Bulletin. Juillet 2011 : de la magie, des super-pouvoirs, des flingues, des armes blanches et des trucs. Tout cela, c'est dans notre sélection de jeux qu'il ne fallait pas manquer le mois dernier. Benjamin Mialot


Dungeon Siege III (Obsidian / Square Enix)

Sur PS3, PC et Xbox 360 Dans le microcosme ultra-codifié et consanguin des hack & slash, la lignée Dungeon Siege n'a jamais dépassé le stade, au mieux, de chef d'œuvre mineur (le premier volet, léché et musclé), au pire, d'outsider condamné aux ligues inférieures (le deuxième opus, paresseux et mal fichu). Las, ce n'est pas Dungeon Siege III qui éclaboussera la série d'une aura à la Diablo. Ce n'est à vrai dire pas plus mal. Car en s'affranchissant du clickfest dont est habituellement synonyme le genre pour lorgner sur les territoires plus littéraires de l'action-RPG, les narrateurs experts d'Obsidian ont indirectement accouché du digne successeur des Baldur's Gate: Dark Alliance. Soit un titre technique, rythmé, prenant et, cerise sur le gâteau médiéval, taillé pour la coopération. Bon, dans l'opération, ils ont oublié de lui insuffler une âme visuelle, mais vous savez ce qu'on dit de la crémière.

inFAMOUS 2 (Sucker Punch / Sony)
Sur PS3 inFAMOUS premier du nom, en son temps, avait relevé un audacieux pari : se hisser au panthéon des jeux d'action super-héroïque sans puiser dans le capital sympathie d'un comic-book pré-existant. Aujourd'hui encore, l'évocation des sentiments de puissance et de liberté qu'il procurait au joueur suffit à allumer des supernovas dans les yeux de ceux qui ont vaincu les affres de l'adolescence avec la complicité de Peter Parker. Bonne nouvelle, ce tour de force, les geeks assumés de Sucker Punch l'ont réitéré. Le secret de ce doublé ? La doctrine Monsieur Plus, inFAMOUS 2se révélant à l'usage plus impressionnant (vaste terrain de jeu que New-Marais, clone dégénéré de la Nouvelle-Orléans), plus jouissif (les nouvelles capacités à disposition sont littéralement cataclysmiques) et plus ambigu (une fois encore, on pourra soit défendre la veuve et l'orphelin, soit leur cramer la tronche) que son prédécesseur. Plus mieux en somme.

Shadows of the Damned (Grasshopper Manufacture Inc. / Electronic Arts)
Sur PS3 et Xbox 360 On ne va pas se mentir, quand on a eu l'artwork de Shadows of the Damned entre les mains, on a fait la moue. Ce beau gosse balafré et poseur, ce gros gun à tête de mort... Non vraiment, ce n'était pas pour nous. Et puis on s'est rappelé que cet emballage putassier renfermait une production Grasshopper Manufacture, la maison du génialement barré Suda51, créateur de No More Heroes. Alors on a ravalé notre appréhension, on y a joué et on a été agréablement surpris. Oh ne vous emballez pas, rien d'inoubliable dans ce TPS punk et gore, en tout cas rien qui ne justifie la présence dans les crédits d'auteurs du calibre de Shinjji Mikami (Resident Evil, Devil May Cry, Ace Attorney, que des références dans leurs genres respectifs), d'Akira Yamaoka (compositeur des angoissantes musiques de Silent Hill) et dudit Suda. Juste de quoi se défouler les zygomatiques, les doigts et les tripes, ce qui n'est en soi pas rien.

Hunted: The Demon's Forge (inXile Entertainment / Bethesda Softworks)
Sur PS3, Xbox 360 et PC Enfin ! Enfin Brian Fargo, vénéré vétéran dont le nom figure au générique de Fallout, Baldur's Gate et, avant cela, The Bard's Tale et Wasteland (quatre monuments du jeu de rôle sur PC) publie son premier jeu original sous la bannière InXile Entertainment. Manque de bol, ce n'est pas très beau à voir. Graphiquement à la masse, guère épanouissant sur le plan narratif et dirigiste, Hunted: The Demon's Forge n'est en effet, au-delà de son esthétique dark fantasy et de sa rafraîchissante nature d'hybride de shoot à la troisième personne et de dungeon crawler à l'ancienne, pas très engageant. Et pourtant, avec un peu de patience, on se surprend, au détour d'un glissement hardcore(les énigmes facultatives sont réellement stimulantes) ou de l'une des interactions dont sont capables l'archère et le guerrier qui y tiennent les premiers rôles (surtout en coop), à franchement s'y éclater, au mépris de ses imperfections.

La bizarrerie du mois

Child of Eden (Q Entertainment / Ubisoft)

Sur PS3 et Xbox 360 Rendez-vous dans l'un des nightclubs les plus légendaires de la planète (l'Amnesia d'Ibiza, la Fabric de Londres, le Womb de Tokyo, ce genre d'endroits) et avalez-y un bol de peyotl, ce petit cactus aux propriétés psychotropes prisé des Amérindiens. Pourquoi ? Pour tutoyer, afin de mieux les éprouver, les extraordinaires sensations provoquées par Child of Eden. Sensations visuelles d'abord, ce shoot'em up conceptuel étant frappé du sceau techno-psychédélique de Tetsuya Mizuguchi, géniteur remarqué du tout aussi radical Rez. Sensations sonores ensuite, vos salves de missiles et rafales de mitrailleuse interagissant avec l'onirique et obsédante bande-son des Genki Rockets*. Sensations physiques enfin, pour peu que vous vous lanciez dans la désinfection du réseau Eden avec la caméra Kinect, périphérique sous-exploité qui trouve ici sa première application excitante. Croyez-nous, vous n'allez pas en revenir.

*Groupe virtuel fondé par Mizuguchi et le producteur Kenji Tamai (leur égérie fictive, Lumi, est d'ailleurs le personnage principal du jeu) et dont la musique sonne grosso-modo comme du Daft Punk branché J-pop.

Et aussi...


Red Faction Armageddon (Volition / THQ) – Sur PS3, Xbox 360 et PC :

On prend (presque) les mêmes et on recommence : guerre civile martienne, bestioles gluantes, décors destructibles, jouabilité in your face... En résulte un third-person shooter d'un manque d'ambition (surtout à l'égard de son très ouvert prédécesseur) inversement proportionnel à son efficacité en tant que défouloir.

F.3.A.R. (Day 1 Studio / Warner Interactive) – Sur PS3, Xbox 360 et PC :

Le plus flippant des first-person shooters sacrifie, avec ce troisième épisode pourtant scénarisé par John Carpenter lui-même, une partie de son insidieuse identité sur l'autel de l'intensité. F.3.A.R. n'en demeure pas moins bien au-dessus de la moyenne en termes de challenge, de contenu et d'ambiance.

Duke Nukem Forever (Gearbox Software / 2K Games) – Sur PS3, Xbox 360 et PC :

Réalisation d'un autre âge, level design paresseux, rythme pataud, modernisation machinale : hormis son louable respect de l'héritage mégalo-beauf de la franchise, cette suite du mythique FPS Duke Nukem 3D n'a rien pour elle. Oui mais voilà, on l'a attendue presque 15 ans, alors on s'en accommode.

Alice : retour au pays de la folie (Spicy Horse / Electronic Arts) – Sur PS3, Xbox 360 et PC :

Alice
, relecture gothique et borderline du roman de Lewis Carroll, était à ce jour le seul jeu digne d'intérêt du prétentieux American McGee. Sa suite, forte des mêmes qualités (souci du détail, atmosphère savoureusement délétère, équilibre stable entre plates-formes et beat'em all), lui tient désormais compagnie.

Jamestown (Final Form Games) – Sur PC :

Un shoot'em up de la plus belle espèce, car fidèle aux canons du genre (bosses cyclopéens, écran quadrillé par la mitraille, éloge du scoring, symphonie de pixels) et néanmoins unique en son genre. Ceci essentiellement grâce à son contexte, qui voit des colons du XVIIe siècle partir à la conquête de Mars.


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