La lune et le magicien


Difficile de trouver plus judicieuse programmation que celle du Voyage dans la lune de Georges Méliès le jeudi 15 décembre à l'Institut Lumière, soit le lendemain de la sortie d'Hugo Cabret, où Scorsese rend un vibrant hommage au cinéaste et à son œuvre la plus célèbre (cf critique). Cette version, en couleurs et sur une musique originale de Air, est celle récemment restaurée par Lobster films et son fondateur Serge Bromberg, la Fondation Groupama Gan pour le cinéma et la Fondation Technicolor. Bromberg l'a accompagnée d'un documentaire revenant à la fois sur cette "résurrection" et sur la genèse du film. Qu'est-ce qui a fait de ces seize petites minutes une date dans l'Histoire du cinéma ? D'abord le culot de Méliès qui, quelques années seulement après l'invention du cinématographe, a l'intuition que celui-ci peut devenir un art. Art forain, certes, mais art narratif aussi : le montage lui offre la possibilité de raconter une histoire ; les trucages, d'une ingéniosité folle, que son passé de magicien lui permet de créer directement sur le plateau, lui ouvrent les portes de l'imaginaire. Méliès avait compris avant tout le monde que la force du cinéma résidait dans les détails : les décors en trompe-l'œil, les costumes des créatures lunaires, l'utilisation de la fumée, tout dans Le Voyage dans la lune trahit ce goût de l'illusion parfaite, du spectacle total, que 100 ans après les plus grands cinéastes continuent de rechercher.
Christophe Chabert


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