Au 14 Février

Cette semaine, c'est le 14 février, et Au 14 Février, nous avons réservé dans le seul restaurant du Vieux Lyon qui marie cuisine contemporaine et raffinement nippon. Sous la toque de Tsuyoshi Arai, huit plats surprises et une étoile. Stéphanie Lopez


Une femme est assise seule Au 14 Février. L'œil pétillant plongé dans une flûte de Billecart-Salmon, elle semble assumer. Pas du genre à attendre l'invitation d'un invraisemblable prince charmant pour goûter le menu «Q.E.D», elle est attablée, sans complexe, au milieu des couples venus se conter fleurette entre une salade de myosotis et quelques pieds d'alouette. Les fous. Ils se regardent dans le blanc des yeux au lieu de contempler la sculpture de Saint-Jacques dans leur assiette. Ils causent déjà layette et maison à crédit alors que le pigeonneau mi-cuit va refroidir dans sa sauce à la rose, grands dieux quel gâchis ! La femme seule aime les surprises, c'est pourquoi elle n'attend rien d'autre ce soir que les huit plats qui vont se succéder, en accord parfait avec la formule à six vins de Masahiro Morita, le sommelier. Elle ne sait rien à l'avance de ce qu'elle va boire et savourer, c'est le concept : Au 14 Février, le menu unique change tous les jours, mais il n'est jamais annoncé.

Surprises du chef

«Le temps, le ciel et les humeurs changent en permanence, remarque Tsuyoshi Arai, alors pourquoi pas la teneur de mes plats ?» En symbiose avec les saisons (gibier et légumes racines sont pour l'hiver ses produits de prédilection), le chef travaille chaque assiette en esthète, comme un peintre combinerait les couleurs, sa palette au service des saveurs. L'amour est bien là, dans le soin et la précision accordés à chaque plat, jusqu'aux deux desserts confiés tantôt au pâtissier Mahaa Ki Shibata, tantôt au Meilleur Ouvrier de France chocolatier Philippe Bel, tous deux capables d'exquises audaces (autour par exemple d'une mousse de Guiness et d'une glace caramel). Quod Erat Demonstrandum (du nom du menu qui signifie «la démonstration achevée»), la femme seule est tombée amoureuse, ce soir-là, le prince charmant s'est transformé en cuisses de grenouilles et crème de parmesan. Le sommelier aux petits soins lui a fait oublier tous les satanés Valentins. Il n'y a guère qu'au moment de l'addition que la femme seule aurait aimé, peut-être, pouvoir compter sur un dulciné. Elle y pensera pour la Saint Glinglin.

Au 14 Février
6 rue Mourguet, Lyon 5e
(04 78 92 91 39)
Menu Q.E.D 75€ hors boissons


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