Irish récit


Un bar en bois, de la bière qui coule à flot, un barman musicien à rouflaquettes, quelques instruments traditionnels. Pas de doute, nous sommes en Irlande, dans une campagne pauvre, apprend-on rapidement. Avec Le Pleure-misère, Flann O'Brien, célèbre dans l'après-guerre pour ses chroniques mordantes tenues dans l'Irish Times, observe avec bienveillance et humour la paupérisation qui gagne son pays. Un gamin gaélique né dans une maison «sans cloison et avec un toit en paille de jonc» doit adopter le patronyme de James O'Donnell, un nom passe-partout qui assure en échange à sa famille une aide des anglais de deux livres par an et personne ! Autre héros de l'histoire, Ambroise, la vache, qui comme les autres animaux vit avec les humains. Après avoir asphyxié la maisonnée, elle meurt, victime de sa propre puanteur. Sans situer son propos précisément dans l'histoire irlandaise, O'Brien lui confère un ton de fable dans laquelle se glisse avec une gouaille et une gourmandise certaines Gilles Fisseau, fidèle des dernières créations de Christian Schiaretti au Théâtre national populaire tout comme Clara Simpson, metteur en scène. En esquissant quelques pas de danse, en sifflotant et surtout en restituant ce monologue avec appétit, le comédien chevronné (il a aussi été dirigé par Jean-Pierre Vincent, Dominique Pitoiset  ou Georges Lavaudant dans Un fil à la patte, mémorable) s'offre ainsi plus d'une heure de spectacle en pleins et déliés, à la fois sérieux et léger.
Nadja Pobel


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