Le Manifeste Chap


Dans Le Manifeste Chap, guide de savoir-vivre que tout gentleman se doit de posséder afin de conserver une attitude impénétrable et désinvolte face aux vicissitudes d'un monde qui ne le mérite pas, il est dit :
«Tandis que des jeunes mal peignés, vêtus de passe-montagne, hurlent des slogans et brisent les vitrines des McDonald's, les Anarcho-Dandys se contentent d'exposer le pli impeccable de leurs pantalons en serge de coton, le sourcil levé au-dessus de leur monocle, un sourire ironique aux lèvres».

Le rapport avec The Chap, le groupe, outre une homonymie à la limite de la provocation ? Aucun, du moins à première vue. Après We are the best, son prédécesseur – un best of –, le dernier album en date de The Chap («Le gars» en argot) s'intitule We are nobody, ce qui, pour eux, revient au même.

Être personne est encore le moyen le plus sûr d'être le meilleur dans sa catégorie. Surtout quand on n'en a pas, qu'on vient de nulle part (un peu partout en Europe) et qu'on ne sait pas trop où on va : ni pop, ni électronique, un peu des deux ou pas du tout, et une vague inclination à la faute de goût, y compris vestimentaire.

Tout cela serait donc sans intérêt si les morceaux de cette joyeuse bande n'érigeaient pas, avec une jouissive efficience, le non-sens en une esthétique de l'insurrection par la danse – au hasard un mélange de jerk et de bostella ; s'ils ne transformaient un nihilisme manifeste (la pochette de Well done Europe, montrant une explosion, celle de We are nobody, représentant un bonhomme préservatif) en une véritable cure anti-crise.

Oubliez les Anonymous, si les "chapistes" votaient, The Chap présiderait l'Europe du Non, du Oui, du Peut-être. Et même du Jamais.
Stéphane Duchêne



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