Dérives artistiques

Entretien avec Damien Blanchard (Administrateur du Bleu du ciel) et Julie Rodriguez-Malti (directrice du centre d'art Néon), jeunes co-présidents d'Adele depuis janvier 2012 Propos recueillis par Jean-Emmanuel Denave


Comment s'est déroulé le premier «Week-end art contemporain» d'Adele l'an dernier, quel bilan en tirez-vous ?
Damien Blanchard et Julie Rodriguez-Malti : Ce week-end était organisé comme un grand voyage sur deux jours, nous proposions 5 parcours, 22 expositions à découvrir et quelques pique-niques dans les cours et jardins de certaines galeries et centres d'art.Le public, très éclectique et de tous âges, était sincèrement enthousiaste.

Quelles seront les nouveautés cette année ?
Il y en a beaucoup. D'abord, nous laissons la possibilité au public de dériver comme il le souhaite, de suivre l'ensemble d'une balade proposée ou de la prendre en cours de route. Ensuite, nous proposons une balade entièrement dédiée aux enfants (et parents), avec un atelier pour expérimenter l'art abstrait ; un coup de cœur pour les éditions Broadcast Posters, sorte de galerie sur papier créée par deux jeunes artistes lyonnais et qui produit deux éditions par an environ ; la visite d'un atelier d'artiste, avec  Zoé Benoit qui ouvrira son espace de travail pour montrer et parler de ses projets en cours. Enfin, de grandes institutions comme le Musée d'art contemporain de Lyon et le Musée d'art moderne de Saint-Étienne ont généreusement accepté d'offrir aux curieux une visite et entrée gratuite de leurs expositions.

Quels sont vos objectifs, vos ambitions ?
Nous avions d'une part conscience d'une véritable demande de la part du public, d'autre part nous avions envie de fédérer les membres de notre réseau (31 lieux) autour d'un événement fort. Ce projet était en gestation depuis quelques années mais l'énergie à déployer et le budget nous effrayaient un peu... En 2011, nous avons tranché pour un événement simple, avec très peu de communication et l'énergie de quelques personnes. La seconde édition s'est construite de la même façon avec une nouvelle équipe… Avec Adele et cet événement, nous souhaitons être le moteur de rencontres avec les amateurs et aussi avec  les «non initiés». Il s'agit de proposer au public un grand rendez-vous culturel à aborder avec décontraction.

Une manière donc de «démocratiser» l'art contemporain ?
Un des grands paradoxes de ces dernières décennies est que dans le pire des cas l'entrée d'un musée d'art contemporain coûte le même prix qu'une place de cinéma, sinon il suffit de pousser une porte pour voir et contempler une œuvre d'art. Et, si le marché de l'art fait beaucoup parler de lui par des ventes à plusieurs zéro, il est moins dit que dans bon nombre de galeries on peut trouver des pièces moins chères qu'un ipod touch 8go ! Ou encore que l'on peut vivre avec des œuvres pendant quelques mois et renouveler son accrochage personnel régulièrement avec un abonnement annuel dans une artothèque pour le prix d'un repas à deux dans un restaurant modeste...

Au-delà du prix, il y a le problème de la compréhension…
Depuis quelques années, on observe que l'art contemporain peut être source de rejet, souvent vu comme un objet absurde ou indéchiffrable dans un monde qualifié d'opaque et de prétentieux... Certes, Adele regroupe un certain nombre de structures exigeantes qui travaillent au soutien de la carrière des artistes, de la recherche dans le domaine de l'art et l'exposition, mais ce qui nous rassemble aussi au sein de ce réseau, c'est l'envie de partager et de démystifier la création actuelle pour la rendre accessible. Adele propose aux différents publics, le temps d'un samedi ou d'un week-end, d'investir les lieux d'art contemporain tout en étant guidés et orientés. 

Quels sont vos projets avec Adele ?
Les chantiers sont nombreux ! Dans un premier temps, il nous semble important d'améliorer la visibilité  d'Adele, le programme bisannuel qui communique sur les différents événements des espaces d'art du réseau, les Samedi  et le Week-end. Faire de ce Week-end un véritable événement qui prend place dans l'espace public, l'agrémenter de conférences et débats sur la création actuelle... Multiplier les Samedi d'Adele tout au long de l'année, et agrandir le territoire : réfléchir à l'échelle régionale et mettre en place des ponts internationaux avec des réseaux similaires en Europe. Et continuer à lire des trucs intellectuels sur la psychogéographie tout en écoutant les tubes de Karen Cheryl qui nous inspirent pour les titres de nos rubriques !


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