Miroir, miroir


Toutes les péripatéticiennes (leurs clients à leurs dépens) et les adeptes de Magritte le savent… «Ceci n'est pas une pipe», que le "ceci" soit image, tableau, ou perception… Les Lacaniens s'en sont alertés : l'image de soi,  reflétée sur un miroir ou via le corps de l'autre, est source de leurre et d'aliénation. L'artiste lyonnais Paul Raguenes le souligne avec ses grands miroirs gravés où, sur l'un d'entre eux, il a écrit : «I never look what I see».

À la BF15, il présente un autre miroir gravé avec cette interrogation : «How not to picture you in this context ?». Et l'artiste canadien Iain Baxter& (né en 1936), rapidement taxé de conceptuel, de répondre en bas du miroir : «& the &man says…&…».

Connu pour ses pratiques artistiques détournant l'esprit d'entreprise, les normes sociales consuméristes, les technologies de communication, ou pour ses déplacements d'images, Baxter& a utilisé lui aussi des miroirs, imprimés d'une esperluette (le "&", sa marque de fabrique, qu'il juxtapose même à son nom), pour photographier quelques édifices lyonnais s'y reflétant. Son esperluette le désigne comme artiste de l'entre-deux, passeur, continuateur…

Paul Raguenes poursuit ailleurs son exploration de structures réfléchissant l'espace autant qu'elles l'interrogent et le déforment avec, notamment, une grande sculpture intitulée Chromotube. Soit des tuyaux de canalisations reliés entre eux en circuit fermé et peints avec de la peinture de carrosserie. Le tout semble comme flotter au milieu de la galerie, de manière assez impressionnante. Décidément, même en «dur» et en pipe-line, toute représentation ici demeure flottante.

Jean-Emmanuel Denave

Iain Baxter& et  Paul Raguenes
À la BF15
Jusqu'au jeudi 28 juillet


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