Ride

Going Blank Again - 20th anniversary deluxe edition (Oxford Music/Import)


Mentionner que l'ex-leader de Ride, Andy Bell, est parti poursuivre sa carrière en jouant les secondes mains chez Oasis au moment même où le groupe de Manchester commençait à sentir le vieux pudding, et qu'il officie maintenant avec Beady Eye (Oasis sans Noel Gallagher) n'est pas le plus beau cadeau à faire à la postérité du groupe qui l'a rendu célèbre. Pourtant le quatuor d'Oxford emmené par Bell, donc, et le lippu et jaggerien Mark Gardener, fut en son temps, et est demeuré, un groupe des plus influents. On entend chaque jour, dans le son d'un groupe passé directement de son garage à la couverture du NME, quelque chose de Ride. Il faut dire que Ride fut, avec My Bloody Valentine, le chef de file du shoegazing (ce courant consistant à jouer de la guitare très fort, si possible en anorak ou dans des fringues trop grandes, en regardant ses chaussures). Sauf que contrairement à My Bloody Valentine dont le seul but était de jouer très fort et très flou dans l'espoir de faire fuir les loups présents dans la tête du fêlé Kevin Shields, Ride avait aussi pour ambition d'écrire des chansons. C'est ce que montre la réédition parue le 20 août de Going Blank Again – que oui, l'on qualifiera d'indispensable, même si c'est la deuxième en dix ans ! Mais celle-ci s'accompagne du DVD d'un concert d'anthologie donné à Brixton donné en 1992, jusqu'ici uniquement disponible en VHS.

Going Blank again est l'album pivot du groupe, son deuxième après le vaporeux Nowhere – lui aussi récemment réédité pour ses 20 ans – qui amènera le shoegazing vers la pop sur la foi de titres comme le terrible Leave Them All Behind. Going Blank Again c'est un peu comme si Kevin Shields de My Bloody Valentine, donc, prenait le thé – sans rien (d'interdit) dedans – avec Morrissey des Smiths. La paire de chanteurs-guitaristes Bell-Gardener y fait des merveilles à coups de mélodies imbriquées dans des atmosphères lysergiques et sans doute cet album est-il le point culminant de leur osmose artistique.

À l'époque, durant quelques courtes années du tournant 80-90, Ride était l'une des fiertés du très fouineur label Creation Records (My Bloody Valentine, Teenage Fanclub, Primal Scream...) qui trouvera sa «next big thing» en la personne d'Oasis, futur employeur de Bell. Car Ride explosa justement en vol, après avoir tenté de surfer sur la vague brit-pop avec Carnival of Light (1994) et le très passable Tarantula (1996)), et s'y être noyé.

Mais, maintenant qu'Oasis est séparé, peut-être Ride peut-il envisager une reformation, et engager Liam Gallagher comme choriste en guise de représailles pour toutes ces années d'humiliations.

Stéphane Duchêne


<< article précédent
Sigur Rós Valtari (EMI)