Biennale de la danse, mode tri sélectif


Une grande dame

«Je travaille toujours sur les mêmes choses : la mémoire, le vivre ensemble, la question de l'Histoire aussi, de ce qu'on nous a transmis, de ce qu'on va nous transmettre», déclare Maguy Marin en préliminaire de sa prochaine pièce au contenu, comme d'habitude, soigneusement tenu secret. Soyons francs : tous les deux ans, pour nous, il y a à Lyon deux événements : la Biennale de la danse ET la nouvelle création de la chorégraphe. Umwelt, Turba, Salves sont les trois dernières gifles artistiques reçues faisant encore circuler notre sang critique et notre goût des corps, des mots (il y a souvent des bribes de textes chez Maguy Marin) et de la musique (signée par le fidèle et talentueux Denis Mariotte) servis sur un plateau par une mise en scène aussi tendue que précise. En plus de sa création présentée au TNP du 19 au 25 septembre, Maguy Marin connaît une actualité richissime : la sortie ce mois-ci d'un ouvrage de Sabine Prokhoris sur son travail (Le Fil d'Ulysse – Retour sur Maguy marin, éditions Les Presses du réel), une journée-rencontre autour de ce livre au Café Danse le samedi 15 septembre à partir de 12h, un «portrait» en huit spectacles dans le cadre du festival d'automne à Paris…

Un grand monsieur

La virtuosité du zapateado (frappement des pieds) et la précision rythmique du compas propres au flamenco, mais aussi quelques traces de butô, des sauts fougueux oscillant entre ceux du ballet classique et ceux du chanteur de rock en concert, ou encore d'indéfinissables postures avec "un je ne sais quoi" de burlesque ou de bizarrerie gestuelle… Voilà quelques-unes des coordonnées chorégraphiques de l'immense Israel Galvan, venu du flamenco pour mieux le métamorphoser voire le faire exploser. Après le jazz, le hard-rock et bien d'autres univers, son solo La Curva (2010) s'imprègne de musique contemporaine baignée de chants traditionnels et fait valser des colonnes de chaises et beaucoup d'autres choses ou idées préconçues (du 16 au 18 septembre au TNP à Villeurbanne) !

Asies

Une Biennale, ça sert aussi et surtout à attirer à Lyon (voire en France) des compagnies importantes se déplaçant rarement. La troupe des artistes de Sebatu-Bali qui rassemble cinquante danseurs et musiciens (autour du dispositif traditionnel du Gamelan) présentera un vaste hommage à Antonin Artaud en trois temps, trois spectacles. Un événement exceptionnel qui s'inscrit par ailleurs au sein d'une programmation riche et prometteuse en invités venus d'Asie… La compagnie de butô Sankai Juku dont nous vous avons parlé ci-dessus, le hip-hop japonais de Mortal Combat, la pièce très attendue d'Hiroaki Umeda (Holistic Strata) qui n'a pas son pareil pour entremêler haute technologie, danse abstraite et mouvements pulsionnels et survoltés.

Azimutés

On vous les a déjà présentés et ils font partie de notre sélection : Cecilia Bengolea & François Chaignaud, Dave Saint-Pierre et Jan Fabre partagent le même goût pour la transgression et le passage des corps à la limite (de la morale, de l'épuisement physique, des règles de l'art chorégraphique…).

Les premiers poursuivent leurs expérimentations singulières aux marges de toutes les danses, le second cherche l'amour dans l'intuition collective et la performance improvisée, le troisième rend hommage aux disparus dans une mise en scène superbe et à travers un solo féminin qui n'oubliera pas Eros au seul profit de Thanatos.

À noter encore :

*Le Croiseur organise à nouveau et courageusement une «Biennale off» sur trois week-ends, du 14 au 30 septembre. Avec des compagnies déjà reconnues et conseillées (Cie Parc, Cie A'Corps…) et une multitude de jeunes compagnies. Toute la programmation de cette 4e Biennale off se trouve sur le site  WWW.SCENE-7.FR/BIENNALE-OFF-2012

*La Biennale 2012 multiplie les possibilités d'échanges entre les chorégraphes et les spectateurs avec notamment de nombreuses rencontres organisées à l'issue des spectacles et des conférences de presse matinales ouvertes à tous…


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Le baptême de Dominique Hervieu